Ne me répondez pas, s'il vous plait, que les dits-sauveteurs ont aussi librement choisi...
Pourtant je ne peux pas te répondre autre chose. Et il faut croire que les sauveteurs prennent leur pied à prendre des risques parfois mortels pour aller secourir des gens. Et je le comprends.
Une partie de ton argumentaire tourne autour de la question de la mort (à repousser le plus tard possible). Mais tout le monde n'a pas comme horizon indépassable de vivre le plus vieux possible. Pour de nombreuses personnes, la question est "Y-a-t-il une vie avant la mort ?".
Une fois de plus, la spontanéité de tes sentiments et de tes réflexes mentaux est loin d'être partagée par tout le monde. Ça t'appartient et tu ne peux pas le plaquer sur les autres.
Si se poser la question de la valeur de notre sécurité rapport à celle d'un vol (même exeptionnel) n'a pas de sens pour nous pilotes, alors il ne faudra pas sembler étonner le jour ou des non-volants se la poseront à notre place en se disant que pour le bien de la société, il est temps de mettre un frein à nos tendances à risques intolérables pour la société.
Est-ce que c'est le cas ? Est-ce que là aussi il faut agiter des peurs "au cas ou " ? Est-ce qu'il y a des menaces concrètes sur notre activité ?
Toi tu penses que les menaces sur notre activité c'est notre prise de risques. Moi je pense que les menaces qui doivent concentrer nos efforts c'est la pression immobilière, l'aviation commerciale et le réchauffement climatique accéléré... Alors ?
Mais j'ai eu connaissance quand je n'ai pas été temoin d'accidents ou d'autres, dont des amis se sont fait mal. Des vols ou je me suis dis une paire de fois ; "Merde... Merde... Merde..." avant d'avoir à nouveau les pieds au sol et la voile dans le sac, me sont arrivés. À chaque fois je ne pouvais que me reprocher, pour synthétiser, ma connerie. Jamais la malchance aurait pu être sur le banc des accusés, non juste ma connerie. Alors non, je ne pense pas voler avec la peur comme passagère.
La peur du pilote en vol, c'est pas la question. Chacun fait avec ce qu'il est. Et ce qui est une connerie pour moi ne l'est pas forcément pour les autres.
Quand personnellement je sur-réagis, c'est toujours que la situation renvoie à mes propres angoisses et que je plaque sur les autres des éléments qui me sont intimes mais qui ne sont pas forcément pertinents pour autrui.
J'ai arrêté de faire le compte des connaissances qui se sont tuées en parapente à 9... et c'était il y a déjà longtemps ! Est-ce qu'il aurait fallu que ces gens-là vivent à tout prix ? C'est leur existence... Une copine parapentiste qui avait échappé à un accident grave est morte 15 ans plus tard d'un cancer... et c'était pas joli... C'est mieux ?
Dans une perspective plus globale, ce que j'aime dans une société c'est sa capacité à accepter et prendre en charge des éléments dits "inutiles", "parasites", "irresponsables". J'aime les sociétés qui ont la capacité de faire vivre la diversité dans un même espace.
Ça fait du bien de côtoyer des gens qui ont des perspectives totalement différentes. Sinon, je pourrais rester uniquement avec des gens qui me ressemblent : des vieux mauvais pilotes expérimentés froussards et prudents ; et ça se finirait à passer son temps à se moquer et dire du mal sur les décollages, ce qui est fun aussi... !