flaille
Rampant
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Aile: Mentor 4 light + Ultralite 16
pratique principale: cross
vols: 700 vols
Messages: 0
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« le: 21 Novembre 2012 - 13:01:40 » |
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Bonjour,
J'ai hésité à créer un autre pseudo pour poster anonymement, mais tant pis, j'assume mon erreur. Lors d'un récent biplace, j'ai emprunter l'équipement d'un ami. Comme nous sommes montés en rando, nous avons réparti le poids ==> aile dans un sac, sellettes et secours dans l'autre.
Arrivés au déco,
- ca souffle, c'est assez fort mais pas dangereux. - il fait froid, je garde mes gants - c'est un équipement que je ne connais pas (enfin je connais l'aile, mais pas l'ensemble de l'équipement) - j'ai un bagage très mince en biplace (40 vols)
Je prépare l'aile, ma passagère s'installe et nous décollons, après 10 secondes j'entends un bruit sourd associé à une légère secousse du côté droit: Vision d'horreur, le maillon à vis en inox principal (au-dessus de l'écarteur droit) vient de s'ouvrir et commence à se tordre. Je pense au pire: on va crasher dans 5 secondes, est-ce que l'on va mourir, souffrira t'on? Très rapidement, une grande honte/culpabilité s'empare de moi. Je n'ai pas envie d'être responsable de ça. C'est injuste, je suis toujours tellement prudent. Pourquoi moi.
Nous montons en dynamique devant le déco assez rapidement, 10 mètres, 20,30,50 mètres, je dois piloter l'aile, car nous sommes dans quelques turbulences. Pendant 10 secondes, mon regard oscille entre la voile qui bouge et le maillon (que j'estime vraiment trop fin) qui continue à se tordre. Toutes les idées me traversent la tête. C'est insupportable. Est-ce que tirer le secours changerait quelque chose, et s'il continuait à se tordre, dois-je me mettre volontairement dans les arbres plutôt que d'affronter les 1400 m de dénivelé, dois-je tenter de reposer immédiatement au déco dans les turbulences, au risque de faire les oreilles, et de générer des secousses dues au flappement des oreilles, dois-je prévenir ma passagère pour qu'elle se tractionne sur l'élevateur pour soulager son poids, est-ce que ce sera suffisant ou bien je vais savoir lâcher els commandes pour faire pareil, comme j'ai plus de force, dois-je lui laisser les commandes et lui demander de maintenir une tension constante aux épaules et tirer moi-même sur l'élevateur? Je ne parviens pas à prendre une décision. Le maillon semble se maintenir... je continue à monter et à prendre de la distance par rapport au relief, nous sommes maintenant dans le laminaire, je lâche la commande droite et fais une poignée témoin, puis deux puis 3 puis 5, en l'espace de quelques secondes, c'est bon, la gestuelle est au point. Je respire un bon coup, et installe mieux ma passagère, les yeux toujours rivés au maillon, je parle pour la rassurer, pour me rassurer, n'a t'elle pa trop froid, est-elle bien installée, je me souviens de ce que l'on a appris en Qbi: ne jamais partager sa peur ou son stress avec le passager, je décide de ne rien dire, d'une part par honte, d'autre part parce que je me rend compte que cela ne changerait rien, on serait toujours accrochés de la même façon, et j'aurais une hystérique devant moi à gérer en plus de la situation.
Le maillon ne semble plus se déformer, il y a environ 1.5cm d'ouverture, mais je dois prendre une décision: je quitte la zone ascendante et le gain salvateur d'altitude par rapport au relief qui pourrait m'être utile en cas de secours, et prenant soin de rester en permanence au-dessus de la forêt. Je regrette l'absence d'un andré rose. Je respire profondément. Nous ne pouvons pas revenir poser au déco sans faire de manoeuvre de descente rapide (wings, 360), et c'est la dernière chose à faire dans cette situation: il va falloir tenir 20 minutes. Je me force à discuter avec ma passagère en ayant l'air tranquille, je souris lorsqu'elle prend une photo de nous: elle adore ce vol, et c'est le pire vol de ma vie. Encore une poignée témoin, trouver des zones de déguelantes, c'est la seule chose à laquelle je pense, je pars en vallée dans une aérologie laminaire, toujours au-dessus de la forêt.
La situation semble stabilisée, le maillon ne bouge plus, ca devrait tenir... c'est l'heure de la recherche de cause. Qu'est ce que j'ai fais de mal, comment j'ai pu foirer à ce point? Je me souviens avoir vissé les maillons avec mes gants à cause du froid, un moment l'aile qui était dépliée s'est faite reculée sur une rafale, j'ai cessé de visser au premier point dur du maillon, après seulement 1/4 ou 1/2 tour pour aller l'affaler. Ma passagère me parle, mais je suis complètement ailleurs, il ne faut surtout pas qu'elle regarde ce maillon, je ne lui dirai jamais, c'est décidé.
20 minutes plus tard, nous arrivons au-dessus de l'attéro, je suis à présent beaucoup plus calme, le maillon ne bouge plus, il ne peut plus rien nous arriver sauf en cas de fermeture qui occasionnerait une détente de l'élevateur, mais l'air est calme, c'est gagné. nous nous posons à la perfection sur une légère prise de vitesse. J'ai réussis, je suis partagé encore le bonheur d'être en vie, d'avoir géré la situation, de ramener ma passagère en entier, de lui avoir offert un vol qu'elle a adoré, et d'un autre côté, cette honte, cette culpabilité d'avoir fait une erreur aussi grave, qui aurait pu être si tragique. Je ressens le besoin d'en parler, de soulager cette conscience, j'attends que mes potes se posent et je leur raconte.
Puis vient le temps des interrogations: qu'aurais-je dû faire. J'ai complètement foiré ma préparation. D'habitude en rando, avec mon ultralite16, connectée en permanence à ma sellette par l'intermédiaire de maillons connects, ma préparation de vol est très limitée, je n'ai qu'à rentrer dans ma sellette (everest2) qui n'a pas de boucle, pas de système d'attache, elle s'enfile comme un baudrier. En rando, au moment de décoller, je suis souvent tendu, les conditions ne sont jamais parfaites, si j'attends trop, je ne décollerai peut-être pas, etc. Ce jour-là c'était pareil, sauf que j'avais quelqu'un devant moi, avec une obligation de moyen et de résultat, avec un matériel que je ne connaissais pas, son proprio m'avait prévenu de faire attention à ce que pendant el gonflage de l'aile, le maillon ne se mette pas de travers, ce qui lui était déjà arrivé, je me suis focalisé sur ce point, puis suis directement passé en mode "démélage, prégonflage, briefing de la passagère, observation des conditions, gonflage, grosse tempo, décollage".
Voilà l'histoire, cela amène à un certain nombre de mesures: Constat: 612 vols en maillons auto et autres connects; 1 vol en maillon à vis ==> Plus jamais je n'utiliserai ce système, ce sera du connect ou de l'auto sur les 6 points d'attache sellettes/écarteurs et écarteurs/voile. ==> Je dois me trouver du matériel à moi, que je connais, et trouver une routine. ==> Il faut absolument que je prenne d'avantage de temps au décollage en disociant clairement deux phases: 1/ La phase de routine, orientée matériel, s'attacher, attacher la passagère, vérifier qu'il n'y a pas de tour d’élévateur, faire une pré vol parfaite. 2/ Et ensuite, dans un second temps, observer les conditions, brieffer le passager, réorienter la voile, la rouvrir au besoin, etc...
En résumé: 1/ le standard 2/ l'adaptation aux conditions.
Si vous avez des observations, des commentaires, n'hésitez pas, ca fait partie du jeu.
NB: un ami m'a demandé si j'avais eu l'idée de renforcer le maillon quand je m'en suis aperçu. Avec des la grosse suspente par exemple, en faisant 5 ou 6 aller-retours entre la sangle de la voile, et celle de l'écarteur. Je n'y ai pas pensé, il n'y avait pas de suspentes de toute façon dans le sac de ma passagère, et je n'avais rien sous la main pour faire un montage de fortune. Voilà, je rend l'antenne dans l'espoir que cette expérience que je ne souhaite à personne permettra à au moins une personne d'éviter de se retrouver dans cette situation insupportable.
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