-Aspect tactique et mentaux, les plus importants a mes yeux!
Pour moi au depart d'un cross on part tous avec une fiole de "Mana" differente et neuve chaque jour. Le Mana c'est se melange d'energie physique, d'energie mentale, de volontee, d'envie de realiser un gros vol, de confiance en soit et en ses decisions, de capacite a gerer ses peurs et son stress. Bref tous les facteurs de reussite.
Au fur et a mesure du vol (et de la saison) on grille ce Mana en echange de nos kilometres. Etre un (bon) crosseur c'est 1) arriver le 15 avril avec la fiole la plus grosse possible 2)trouver le juste milieu entre kilometres parcourus et Mana depensee pour eviter de se retrouver la fiole vide le 2 avril a 14h30 tanque a Montmelian avec la voiture au deco de Saint Marcel
Dans le cross ideal vous l'aurez compris la fiole n'est vide qu'au moment ou on touche le sol a cote de la voiture et elle sera rechargee pour le cross suivant.
Voila comment j'essaye de "voler utile" Mana-wise :
a) On commence par le plus simple et le plus evident : voler. Le plus possible. J'insiste pas plus, tu le sais deja et malheureusement la vie fait qu'on est pas tous ego sur le sujet
Mais clairement le nombre d'heures (si elles ont ete effectuees dans de bonnes conditions) conditionne la performance bien plus que de se dire qu'on va pousser le barreau de 2km/h supplementaire. J'ai discute de cela avec Tom, DDB : apres nos periodes de vol intense comme par example en avril on atteint un stade ou on se sent quasi infaillible (au sens tactique du terme). On sait pertinement qu'on est pas a l'abri d'un accident (surtout qu'on en arrive a voler fatiguer lorsque l'anticyclone s'installe et les jours s'enchainent...) mais en l'air on a le sentiment que rien ne peux nous empecher d'atteindre notre prochain point de contournement meme si ce dernier se trouve a 80km de la ou on est. On prend une decision, sans hesiter, et ca marche. A tous les coups. Alors que 2 semaines avant on se plantait 1 fois sur 2. Ce sont vraiment des periodes de vols completement dementes et point de vue consommation de mana c'est tres rentable de voler dans cet etat d'esprit et en accumulant cette confiance
Bon c'etait con, ca vous a surement rien appris mais sachez qu'il y a des fous qui volent principalement pour la recherche de ce flow! Des malades, des junkies, ce que vous voulez!
b)Avoir confiance en son materiel. Je vais pas vous ressortir l'eternel couplet sur la bonne adequation du couple aile pilote, surtout que j'ai passe mes 1ere annees a voler sous des ailes trop pointues pour mon niveau et que je ne suis pas sur de m'etre encore completement gueri. J'insiste pas non plus sur l'utilite des SIV, POB fait deja ca tres bien dans quasiment tous ses posts
Quand je vois des gens sur ce forum demander "pensez vous que j'ai le niveau pour voler sous telle voile" (sic) cela me plonge toujours dans un abyme de perplexite! La reponse a cette question est en vous, ne comptez pas sur les autres pour vous la donner.
Je suis toujours surpris du nombre de "fermetures" rapportees par les pilotes lors de leur vol. Et surtout surpris de la facilite avec laquelle ils semblent en faire abstraction. Je ne pense pas que ce soit si simple, pour moi chaque fermeture meme benigne est un signal d'alerte et un vrai videur de mana donc tres mauvais pour la performance! SI on prend beaucoup de fermetures il faut s'interroger sur son PTV ou sa voile par example.
Sur le choix de la voile : vaut il mieux un gun ou on est a 75% dessous ou une aile un peu moins perfo ou on est a 100%
Et ben je sais pas!
Regardez le classement de Xcontest pour 2011 :
http://www.xcontest.org/2011/world/en/ranking-pg-open/ Pas un seul gun dans le haut du classement, que des ailes homologuees.
Regardez le classement de la CFD sur cette meme periode :
http://parapente.ffvl.fr/cfd/classement/G/2010Que des Guns.
Alors je suis perplexe! je dirai que cela depend pas mal du terrain que vous frequentez. Il semblerait que dans les Alpes du Nord les conditions soient plutot gentilles et du coup les guns l'emportent. En Suisse ou les cross se font plus en haute montagne les piltoes d'ailes homologuees sont plus a l'aise. Chois ton camp camarade, mais choisis le bien!
c)Avoir confiance en soi :
Ne pas toucher son premier thermique de l'annee un 15 avril a saint hil a 11h30 est un bon point de depart! L'aerologie monte en puissance graduellement entre Janvier et Avril : dans la mesure du possible faites en autant! La fiole se vide quasi instantannement (et pour un sacre bout de temps) si des le debut de son cross on a le sentiment d'etre completement depasse par les elements. Inutile de dire que si on persiste et que ca se termine en sketch y a de bonnes chances que le systeme de recharge mette un bon paquet de temps avant de remarcher!! Des tres bons pilotes qui ont rate une saison entiere comme ca j'en connais au moins 2... et ca rend malheureux!
En tout debut de saison bannir le cross les jours ou le vent est "fort". C'est contre productif car cela nous amene a subir l'aerologie et on a vraiment pas besoin de cela lorsqu'on est en pleine prise de repere. Le vent c'est LE MAL.
Jusque la c'etait un peu banal, rentrons dans le vif du sujet. Pour moi c'est en thermique qu'on peut gagner le plus de temps.
d) Apprendre a enrouler l'ascendance jusqu'en haut proprement et s'y astreindre sur chaque montee en thermique, quel que soit la force du thermique! Alors ca pour moi c'est LE point qui peut faire vraiment gagner du temps a un apprenti crosseur et j'ai bien lutte pour y arriver pour la simple et bonne raison que ca fait peur certaines fois! Tout est affaire d'auto persuasion.
Visualiser l'extremite du nuage et en fonction de son estimation de taux de monter, quitter le noyau pour sortir de l'ascende pile dans les barbules et sans que le coeur monte dans les tours a chaque fois. Que cela devienne naturel. C'est exactement comme pour savoir si en vol vous allez reussir a atteindre un attero ou non. La, votre attero c'est le ciel bleu.
* Partir trop tot c'est se priver de ces longues finesses de ouf qu'on arrive a avoir lorsqu'on navigue au sommet de l'ascendance et c'est l'assurance de perdre de precieux metres dans la degueulante qui entoure le thermique. Mais vraiment quand on atteint une certaine altitude il est assez courant que sur le 1er km de transition on se retrouve a 30/40 de finesse quand ceux partis 100m plus bas sont a finesse 7.
* Partir trop tard c'est se retrouver pris dans le nuage, avec certes a la clef pas mal de metres supplementaires gagnes pour votre transition prochaine. Mais c'est une vision tres court termiste je trouve. Apres on est pas tous ego fasse au stress dans le nuage je le sais bien mais globalement la strategie peut eventuellement marcher 1 fois dans le vol mais plus c'est bien trop exigeant mentalement et ca vide le Mana de maniere incidieuse mais tres efficace!
Souvent je vois des pilotes abandonner le thermique des dents de Lanfont quand ce dernier se fait un peu capricieux afin de se lancer dans la transition vers le roc des boeufs.Il est vrai que ca raccroche systematiquement de tres bas en face et que c'est un choix qui ne va pas vous amener a vacher. Mais il faut savoir se faire un peu violence pour essorer ce thermique jusqu'en haut afin d'arriver directement a la 2eme ligne par example, ca peut vous epargner des longues minutes de zig zag pour sauter la 1ere ligne dans le reste de stabilite en compagnie de tous les pilotes qui ont fait le meme (mauvais) choix que vous avant.
Bon j'insiste pas plus mais pour moi si vous arrivez a sortir tous vos thermiques par le haut vous gagnerez BEAUCOUP plus de temps qu'en faisant toutes vos transitions 2km/h plus vite par example.
Niveau mana le bilan est pas pire : cela va vous couter plus pour reellement faire le plaf MAIS durant la transition potentiellement vous serez moins contre par les brises de vallee ET vous allez rapidement rattraper votre collegue qui pensait vous avoir joue un bon tour. Le survoler devrait remplir la fiole a un niveau tout a fait acceptable pour pouvoir remettre ca au thermique suivant.
Et attention : a mes debuts en compete, j'assurais toujours les plafs jusqu'aux barbules, et pourtant j'avais systematiquement des gens toujours plus haut. Alors je les guettais pour voir s'il volaient dans les nuages. Mais non! Ils avaient juste un bien meilleur placement que moi. 200m + haut hors nuage alors que vous vous etes au barbule c'est tres courant et c'est enervant quand c'est vous qui etes plus bas.
e) Une des conditions pour reussir le point d) : Avoir confiance en sa capacite de s'echapper du nuage. Je me permet de tutoyer la base du nuage car j'estime que vu sa taille, vu les Vz que j'ai croise jusqu'a maintenant je vais etre capable d'envoyer une bonne serie de 36 (ou pousser le barreau) AVANT de me retrouver dans le brouillard complet. J'insiste sur le AVANT car dans mon cas plus de 5 secondes sans visi et c'est vidange de mana assuree
Anecdote : 21 avril 2010, LA journee de l'annee ou pleins de crosseurs realisent leur premier 200 kils. Avec Bertrand on fait la cats craddle. 2 jours avant on a boucle le desormais assez classique parcours Charvin Saint Eynard retour de 180km donc les previs etant encore meilleurs on vise un triangle plus ambitieux (et different car Bertrand est un esthete!) avec Pointe percee, Parmelan, 7 Laux. Le debut du vol se passe moyen c'est un peu humide dans les aravis a cause des orages de la nuit precedente et on fait demi tour au col des aravis d'un commun accord (j'aime voler avec Bertrand car il est pas du style a rajouter 1km quand il vous a vu tourner a cause d'une aerologie moisie!).
Ensuite nos chemins se separent et je le perd de vue. Je le retrouve bien bas sur la face Est du Veyrier pendant que j'entame ma transition Thones -> parmelan. Visiblement c'est la galere sur Annecy alors quand en arrivant a la tete a Turpin je prends un +2 salutaire je tire les aeros freins pour rester dans la zone le plus longtemps possible. L'ascendance est puissante, Vent meteo Ouest, j'avance a 10km/h dans du +3 et putain ca monte GRAVE (j'hallucine toujours sur les Vz annoncees par certains pilotes, ils doivent pas integrer sur 20 secondes mais sur 1/4 de seconde ) Bref les barbules arrivent a grand pas je lache les freins poussent gentiment l'accelerateur sur au moins... 1 demi centimetre (trop peur pour faire plus, un vario en continue a +3 c'est angoissant) et hop 20 secondes plus tard je suis toujours au meme endroit sauf que cette fois je suis happe par le coton, plus de visi.
Bon je panique pas encore au point ou je me met a chanter (ca arrive...) et je me concentre sur mon cap pendant que bipbipbip, vitesse sol toujours 10km/h. une fois a 2900 ca commence a ralentir et a 3000 je sors. Soulagement, grande inspiration pour evacuer le stress. J'essaye de retrouver ma lucidite pour analyzer quel a ete mon erreur de jugement (renforcement de l'Ouest au parmelan c'est assez classique...) et continuer le vol sur de bonnes bases. Je crois y etre parvenu et profite de cette traversee toujours aussi magique au dessus du lac en sirotant ma compote de pomme. Arrive l'Arcluse ou je sais que je dois faire un gros plaf pour transiter sur champ Laurent ou au pire Chamoux pour respecter notre plan de vol vers belledone que je vais malheureusement devoir affronter seul. Le thermique de l'arcluse est probablement celui que je redoute le plus. Avant le 1er bip je dois probablement etre a 90% de ma Fc Max. Et c'est parti, meme son strident qu'au Parmelan, +3 bien regulier qui devrait me faire hurler de joie. Sauf que non, je suis desormais completement obnubile par le fait de ne pas me refaire happe par le nuage une seconde fois et du coup ne me concentre plus sur le bon objectif.
Je quitte le thermique a 2500 (soit 500m avant le plaf du jour!) me fait deglinguer en regle dans le debut de transition et.... m'estime trop juste pour Chamoux. Voila comment betement foirer son cross le jour le plus fumant de l'annee! je rentre tout penaud vers Ugine et gromelant sur mon incompetence... Une bonne lecon!f) Ne volez pas devant (ca Limo c'est bon tu geres deja)! Meme si vous vous sentez le plus rapide du groupe ou meme si le groupe se resume a 1 seule autre personne. Exploitez les autres meme si vous doutez qu'ils puissent vous aider! C'est au moment de pousser les balises qu'il faut etre le plus haut et le moins tard possible. Pas a midi a mi parcours de la 1ere branche.
Sachez prendre votre temps et ne paniquez pas car tout votre groupe a pris 20km d'avance ou de retard!
Anecdote : http://parapente.ffvl.fr/cfd/liste/2008/vol/20080778 4 avril 2009 les Zelephs se donnent rendez vous a Saint hil sous la houlette de Dieu (alias Gerald Delorme) pour faire le FAI classique Saint Eynard Granier Belledone. J'ai vole sur ce meme site 4 jours avant et boucle un A/R au Saint Eynard dans des conditions pas evidentes. Donc la confiance est la. La classique petite inversion de debut de printemps mets un peu de temps a sauter et sur le retour du Saint Eynard se pose le probleme de comment passer a l'etage du dessus. Bertrand est deja loin devant(je n'ai pas encore integre le fait qu'enrouler le long des falaises du saint eynard est un peche et fait perdre beaucoup de temps!) et chemine en direction de saint marcel par les falaises du bas. Je decide d'insister un peu pour raccrocher sous la dent de crolles car un gun semble avoir pris cette option. et Bingo ca marche! On se retrouve a cheminer bras haut cheveux au vent pendant que Belette et les autres miserent dans les basses couches!
YEAH j'ai pose tout le monde I am the king of ze petrole. Sauf que l'euphorie se calme bien vite lorsqu'une fois au Granier je me retrouve seul sans avoir aucune idee de quoi faire alors que dans ma tete j'etais parti pour un vol de groupe! Et puis bon se mettre en attente au Granier quand ca tape un peu euh... c'est pas pour moi Resultat : la trace parle d'elle meme, je bascule trop tot sur les faces Ouest de Belledone, s'en suit une lente agonie qui m'amene a echouer a 3.2km du deco. Dans ces cas la vaut mieux couper la radio pour ne pas entendre les hourra de joie que vos compatriotes poussent lorsqu'ils depassent les 2000 pendant que vous etes en train de plier. g)Eviter les points bas "devastateurs" qui coutent si cher en Mana. Rien de plus insupportable que de voir des pilotes arriver 100m plus haut et enrouler directement le thermique que vous vous escrimez a essayer de chopper en faisant des 8 car helas il est trop inconsistant a votre altitude pour pouvoir faire un tour complet dedans. On s'enerve tres vite dans ce genre de situation et la Mana s'envole aussi vite que toutes les feuilles qui montent alentour pendant que votre vario beugle BEUUUUUUUUUUUUUU en affichant -2.5m/s
Il faut donc anticiper. Vous etes sur la Face Est du Granier a 13h30 a 2100 aux barbules, la Savoyarde vous tend les bras meme si personne n'a encore fait la transition. Un pilote est 2km a votre gauche sur la face Ouest et il monte 300m plus haut que vous. Tant pis vous avez deja commence votre transition, ca va passer, et puis de toute facon c'est deja passe la derniere fois avec 2000 donc feu gaz. Arrive a 1km de la savoyarde vous etes a 5km/h, vous raccrochez ric rac et s'en suit 30 minutes les pieds dans les feuilles a faire des aller retour 200m au dessus des vignes. Vous finissez par sortir, la fiole de mana vide. Votre Acolyte enroule deja tranquillement au Colombier!
Mieux vaut faire 2km de detour en etant a 2000m d'altitude que 30min de surplace car vous etes arrive 400m trop bas pour chopper le thermique bien organise (haha j'adore parler de thermique organise a la Savoyarde)
Anecdote : J'en ai trop!
h) Garder la lucidite en tout circonstance. Quand vous vous retrouvez dans une situation merdique dites vous que 1 si vous etes la c'est par choix 2 paniquer ne va faire qu'empirer la situation.
Dans le feu de l'action on a systematiquement tendance a s'exagerer les risques (instinct de survie), tenez en compte, soufflez bien quand le cardio monte!
Manger des compotes de pomme dans les transitions va vous aider physiologiquement mais cela vous permettra aussi de vous "sortir de votre vol", d'avoir un regard exterieur pour l'analyzer et vous poser les bonnes questions : Pourquoi suis je aller me mettre dans ce plan moisi tout a l'heure, finalement etait ce vraiment si risque? Essayer de systematiquement avoir une reponse pour chacune de vos erreurs. Au lieu de pousser votre barreau poser vous un max de question : suis je en train de prendre trop de risque, comment l'aerologie evolue t'elle, comment va se passer le prochain raccrochage. Observez les autres aide aussi a garder la lucidite "ouf je suis pas le seul a me faire bien brasser aujourd'hui"