Hier, lors d’une réunions interclub, j’ai entendu pour la première fois la phrase « voler vieux » mise en parallèle avec les actions fédérales « voler mieux ». Ceci croisé avec le retour d’expérience et les récentes mésaventures de quelques amis pilotes, plus nécessairement de première main, tout comme moi, m’a amené à la réflexion suivante.
Tout le monde connaît cette phrase que l’on entend dans le cadre d’un peu toutes les pratiques à risques, qu’elles soient sportives ou non : « il n’y a pas de bons pratiquants, que des vieux pratiquants ». Vous pouvez remplacer à votre guise le mot « pratiquant » par motard, plongeur, alpiniste, parapentiste, pilote de course automobile, boxeur, guerrier, etc… Cela signifie juste qu’un « bon pratiquant » est celui-ci qui n’a jamais pratiqué au-delà de son niveau pour ne pas se mettre en danger, et qui donc a pu poursuivre son activité longtemps. On ne compte plus les gens surdoués dans une discipline qui y ont laissé leur peau faute d’avoir surestimé leurs capacités à un moment donné.
Le parapente fait partie de ces activités à risques. En revanche, il fait aussi partie des activités qui peuvent être pratiquées longtemps, et jusqu’à un âge plus que certain, avec plaisir et sérénité pour le plus grand bien être des pilotes, tant que la tête suit.
Il n’y a donc pas de raison d’en priver les passionnés. Toutefois, pour qu’un « vieux pilote », par les années de pratique ou par l’âge, demeure, et pour longtemps, un bon pilote, encore faut-il qu’il sache identifier l’évolution de ses propres capacités, et admettre la nécessité de faire évoluer ses pratiques en conséquence. Et peut-être même savoir renoncer à quelques-unes.
Il n’est absolument pas question ici de tirer à boulet rouge sur les séniors, ou ceux qui pratiquent notre sport depuis des lustres, bien au contraire. Ils ont acquis des connaissances humaines, techniques et de l’environnement que les plus novices mettrons des années à engranger. Toutefois, il leur faut aussi reconnaître que si le matériel a évolué depuis leur apprentissage, il y a parfois plusieurs décennies, leurs techniques de mise en œuvre devraient avoir évolué elles aussi. De même, que l’on ait 40 ou 80 ans passés, et bien que nous soyons globalement en bien meilleure forme que nos parents et grands-parents au même âge, on a plus les mêmes capacités physiques, cognitives et de réactivité que lorsque nous avions 15 ou 20 ans de moins.
Même moi qui dispose pourtant d’un corps de dieux grecque en acier trempé 24 carats qui fait la fierté de ma maman, et bien je déborde désormais légèrement de la ceinture des pantalons pattes d’éléphant qui ont fait ma réputation dans les 80’. Comme quoi, hein !...
Il n’y a rien d’anormale ni de triste à cela, bien au contraire : Avec le temps on s’est forgé une expérience riche des centaines d’heures de vol engrangées et un certain recul sur la pratique de l’activité, et ça, ça n’a pas de prix.
Le temps libéré par les enfants qui ont grandis, la retraite pour certain et les RTT pour d’autres, doivent permettre de mieux choisir nos créneaux favorables. Savoir attendre ou renoncer à voler maintenant et tout de suite si toutes les conditions ne sont pas favorables. C’est d’autant plus facile quand on n’a pas de rendez-vous professionnel, ou d’enfant à aller chercher après, qu’on pourra revenir demain, ou après-demain quand ce sera mieux, quand on ira mieux, quand il fera moins chaud…
On peut aussi adapter sa technique au nouveau matériel, plus léger, qui nécessite donc moins de force physique, qui autorise plus de tolérance dans la gestuelle pour décoller et voler décontracté, poser à plus basse vitesse… On peut aussi passer une journée avec un moniteur qui va nous aider à analyser nos nouveaux besoins, et à y trouver des réponses, comme par exemple nous montrer une nouvelle méthode de gonflage moins violente, et plus sécurisante, un matériel mieux adapté, etc… Il faut juste reconnaître que si les temps changent, et bien nous aussi.
Je trouve qu’il serait intéressant qu’un cursus dédié à l’accompagnement spécifique des « anciens jeunes pilotes » soit étudié et déployé dans les écoles et clubs. Et ça justement pour qu’on continue à avoir plein de vieux bons pilotes en activité, parce que c’est cool et sympa !
Non ?