A quoi pense-t-il ?
En effet, comme cité plus haut, la longueur du cône de suspentage est un élément de stabilité. Malheureusement, un suspentage long gomme aussi la réactivité de la voile. Une augmentation de la longueur du suspentage augmente les constantes de temps (délais) entre une variation des efforts sur la voile (migration de la portance pour un virage, ou lors d'une entrée en thermique) et son effet. En ce sens, cela participe à l'amortissement. Si on allonge trop, les "délais" sont vraiment trop longs entre une action de pilotage et sa conséquence dynamique, ou entre une variation de portance (turbulence) et sa conséquence. Le dragon du regretté Francis Heilmann avec 14m de hauteur sous voile devait se piloter avec une grande anticipation, la période du pendule étant très grande. A l'extrème, les kiters qui "volent" sous leur kite sont tellement "déphasés" qu'ils n'ont pas intérêt à voler par une aérologie mouvementée
Par ailleurs je pensais lors de la rédaction de cet article (quelques années déjà
) à ce qui permet de rendre l'aile "adaptative" à la turbulence (prise dans le sens d'une variation de vitesse verticale ou horizontale ayant pour effet de faire varier corrélativement l'incidence, globale ou sur une partie de l'aile). Le profil est essentiel dans ce mécanisme. On a vu précédemment que selon la cambrure du profil, il possède un "coefficient de moment" Cm0 positif (profil plutôt reflex à cambrure en S), négatif (profils cambrés uniquement vers le bas) ou nul. Les profils d'aile, donc les ailes équipées de ces profils, ont des comportements radicalement différents en cas de variation d'incidence, par exemple lors d'une entrée dans un thermique (l'incidence augmente) :
profils à Cm0 nul : pas de variation de centre de poussée. la portance reste à sa place, l'aile ralentit, et le pilote continue sur sa trajectoire ce qui fait cabrer un peu l'ensemble.
profils à Cm0 négatifs : le centre de poussée avance, donc crée un moment à cabrer par rapport au pilote, ce qui tend à augmenter encore l'incidence, l'aile cabre et ralentit beaucoup, elle refuse le thermique
profils à Cm0 positifs : le centre de poussée recule, ce qui crée un moment à piquer qui tend à diminuer l'incidence, l'aile avance et "mord" le thermique.
en sortie de thermique (diminution rapide d'incidence) c'est le contraire : une aile à Cm0 négatif va "shooter", une aile à Cm0 positif va plutôt conserver son assiette.
en résumé, un profil à Cm0 positif tend à "gommer" les variations d'incidence et décharge donc le pilote, un profil à Cm0 négatif tend à amplifier les variations d'incidence et va faire travailler le pilote
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A l'époque, proposer un parapente perfo à 6 d'allongement avec un profil "autodémerdant" à Cm0 positif m'a été reproché comme "dangereux" car mettait la perf à la portée de pilotes lambda... Raisonnement simpliste et sophiste du genre : une aile perfo DOIT être pilotée et être réservée à de BONS pilotes
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Depuis l'eau a coulé sous les ponts, pratiquement toutes les ailes d'aujourd'hui ont ce genre de profil, on dit qu'elles "flottent", qu'elles ont de "l'énergie", etc... cela me fait un peu rire. Elles ont toutes la caractéristique de s'adapter aux variations d'incidence, de les contrer. En plus si un profil "à Cm0 positif" est complété avec un shark-nose, celui-ci lui permet d'accepter des incidences plus faibles et donc des "claques" plus grandes, ce qui est tout bénef
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Enfin, un autre moyen complémentaire de "s'adapter" à la turbulence pour une aile équipée d'un tel profil est de laisser l'aile respirer, que chaque partie de l'aile puisse "s'autodémerder" indépendamment avec une méchante turbulence qui ne serait pas "globale" mais locale. Par exemple qui n'intéresserait qu'une moitié d'aile. A mon sens, à définition aéro égale avec un profil à Cm0 positif, une aile moins tendue est plus adaptative et moins "méchante" qu'une aile plus tendue. Une partie de l'aile se débrouille alors que l'autre n'a rien vu car la souplesse ne transmet pas les variations de tension à l'autre partie... Un peu comme les deux roues suspendues d'un VTT, comparé à un vélo bien "rigide". Bien sûr on n'est pas tous du même avis, ce qui permet le débat
Olivier