Hier soir, je m'étais dit : " Tiens, comme j'ai pas grand chose de prévu, demain s'il fait beau j'irais bien voler". J'avais même déjà charger le sac à dos dans la voiture.
Ce matin en tirant les rideaux, il faisant beau !
Donc j'ai pas trainé à me laver et m'habiller pour aller voler. Et ça n'a pas tardé. J'ai volé ! Aussitôt que j'ai eu déverrouillé le portail,... j'ai volé !
Par dessus la piscine et jusque dans la haie de cyprès, j'ai volé. Sans aucun doute, j'ai volé... et j'ai même fait une approche de la haie en PTI, le tout avec un superbe flaire. Et pour ce qui est du flaire dans les cyprès, faites moi confiance, je m'y connais. En cette saison et avec mes allergies, les cyprès je les flairent à des kilomètres à ça avec plus d'assurance encore qu'un chien policier sur la trace d'un dealer de quartier. Pour preuve, mes sinus perpétuellement bouchés, mon éternelle goutte au nez et mes indissociables yeux rouges.
Faut dire que les rafales de mistral à plus de 110 km/h qui soufflent ce matin y sont probablement pour quelque chose. D'ailleurs, par dessus la haie de cyprès, j'ai aussi vu volé le facteur,... le facteur avec son vélo.
Si, si.... je vous assure, tout à la joie de m'informer qu'il avait enfin un Pape tout neuf pour le guider, c'est quand le vent arrière s'est engouffré brutalement, et par surprise, dans l'une de ses sacoches laissée ouverte par mégarde que, l'homme de lettres touché par la sainte grâce, a lui aussi pris son envol et de la distance par rapport à son habituelle tournée. Approchant ainsi le royaume des cieux du tout puissant, et touchant par la même du doigt la félicité spirituelle, et du sommet de son crâne le tronc du cyprès. Par chance il s'en sort sans blessure. "Un miracle ! " Assure-t-il.... Mais à mon humble avis de mécréant, il a surtout eu de la chance d'avoir glissé un épais bonnet de laine sous sa casquette réglementaire.
De mon coté, n'étant pas astreint, du fait de mon statut de chômeur indépendant, au port d'un uniforme de fonctionnaire à casquette, et peut être aussi étant moins sujet à la bienveillance divine, je n'ai pas eu cette chance et dois déplorer des plaies largement plus profondes que mes convictions religieuses... très superficielles, elles.
Ainsi soit-il... Habemus papam. C'est bien possible facteur, mais moi en attendant : A bobo au plexus.
Pour le coup, voila qui met un frein à mon enthousiasme parapentistique du jour. Je vais plutôt commencer par soigner mes plaies et bosses, en réfléchissant sérieusement aux dangers liés à l'utilisation d'un vélo jaune avec des sacoches non homologués ayant plus de 5 d'allongement par un pilote non breveté quand les conditions météo se dégradent.
J'en profite pour demander aux instructeurs brevetés qui me lisent ci, puis-je inscrire ce vol sur mon carnet ? Aussi bref fut-il, il y a bien eu un décollage, une phase planée et une prise de contact avec l'environnement fixe. Non ? ...
D'un autre coté, j'ai que ça pour m'occuper puisqu'il ne faudra pas compter non plus sur la lecture de mon courrier pour me distraire; sachant que celui-ci à été dispatché par voie aérienne sur l'ensemble du département... avec l'aide du Mistral bien sur, et suite à l'ouverture incongrue de la sacoche du susmentionné préposé. ... Quoi que.... à bien y regarder, de ma fenêtre, c'est pas l'animation qui manque : les arbres et les lignes électriques dansent un balais frénétique, une poule du voisin s'essaye pour la première fois de sa carrière au vol à voile. Elle n'aurait sans doute pas du déployer ses ailes au sommet du tas de fumier, car la voila maintenant en plein survol de l'église, en proie à fortes turbulences au passage des rouleaux du clocher. Pour un premier vol, c'est une sacrée première ! De toute évidence elle est surtoilée et gère très mal tangage et roulis. L'atterrissage du gallinacé domestique de l'autre coté de la colline risque d'être pour le moins sportif, en espérant qu'un motard de passage sur la RN 113 ne se la prenne pas en pleine poire, mais je n'en serais pas témoin.
Bon, et bien puisqu'il n'est plus question de voler aujourd'hui, et comme la dernière fois j'ai replié ma voile en dépit du bon sens, je vais en profiter pour la replier correctement. Elle prendra moins de place dans le sac au moment de prendre l'avion la semaine prochaine en direction du Maroc.
Je vous vois venir d'ici à vous dire : "Il doit vraiment avoir une case en moins à vouloir déplier son parapente pour mieux le remplier un jour de vent comme aujourd'hui !"... Mais vous me prenez vraiment pour ce que je ne suis pas. Je n'ai aucunement l'intention de faire cela dehors ! Dans le garage, une fois celui-ci débarrassé c'est largement plus raisonnable. Non ?
Aussitôt dit, aussitôt fait. La voile est largement déployées... enfin disons plutôt que le bouchon à repris du volume compte tenu du manque de place au sol. Tout se passe à merveille, malgré la difficulté que j'ai a évoluer dans ce garage de 12m2 et 1.80m de hauteur sous plafond avec une voile de 21 m2 et quelques centaines de mètres de suspentes multicolores en vrac. Tiens, il a du bruit, on gratte à la porte. Le chien sans doute. Je ne vais tout de même pas ouvrir, il serait bien capable de rentrer comme un fou pour me faire la fête en sautant partout, et de foutre encore plus de bordel dans mon merdier. Pas question. Je lui crie d'aller se coucher et basta ! Vraiment pas besoin de ce cabot en ce moment, déjà que j'aurais pas du garder mes godasses de randonnée en montagne. Non pas qu'elles me tiennent trop chaud aux pieds dans ce garage glacial, mais c'est que les suspentes s'accrochent en veux-tu en voila dans les nombreux crochets des lacets.
Et pourquoi il n'obéît jamais à ce qu'on lui dit ce foutu clebs ?
Non seulement il continue de gratter à la porte, mais en plus il se met à pleurnicher , et ça je supporte pas ! Je m'en vais te lui foutre mon pied au cul que ça va pas être long et que ça va lui passer l'envie de pleurnicher pour un moment !
Et merde !...
Dans un mouvement de colère à peine esquissé, j'ai du me prendre dans une suspente qui aura tiré sur la voile qui s'est aussitôt collée sur l'ampoule à incandescence qui aura elle même claquée instantanément.
Je n'y vois plus rien. Je n'ai plus qu'a trouver à tâtons la poignée de la porte du garage pour la soulever légèrement, et ainsi elle laissera glisser le filet de lumière salvateur.
Ce que je fais, sommes-toutes sans trop de difficultés en quelques dizaines de secondes à la plus grande joie du chien qui en profite pour se glisser aussi sec dans le garage en sautant partout. La situation est explosive, je ne dois pas le laisser courir plus longtemps la dedans.
En d'autres termes, mes facultés de décision prennent très rapidement le pas sur mes facultés de réflexion, et j’envoie un shoot magistral dans l'arrière train de Rex pour l'expulser hors de mon refuge. Opération réussie : Le chien dégage à vitesse grand V, emportant avec lui une belle pelote de suspentes qui prennent le soin d'agripper au passage les crochets de mes godasses, et la poignée de la porte basculante. Poignée que j'ai malencontreusement du lâcher sous l'effet de la surprise lorsque les suspentes tendues par la course folle de l'animal m'ont déséquilibré.
Le vent s'engouffre alors simultanément, dans la porte qu'il relève complètement, me suspendant alors par les pieds, et dans la voile qui, profitant de cet espace de liberté inattendu, démontre ici toute ses qualité de gonflage rapide et symétrique, ainsi qu'une prise en charge sans faille, même dans le vent sans fort.
Me voila donc suspendu par les pieds entre ma Zunzun et la porte du garage, avec toujours ce foutu chien qui jappe et saute pour essayer de me mordiller le visage lorsque je redescends plus prés du sol au grés des balancements induis par le roulis de la voile que je ne contrôle absolument pas, faute d'avoir réussi à me saisir des freins.
Par chance j'ai tout de même pu attraper au vol mon portable avant qu'il ne tombe de ma poche pour s'écraser au sol, et prévenir les pompiers. Et puis en comme j'avais du réseau, la 3G, et toujours un peu de temps libre devant moi, j'en profite pour envoyer ce petit mot en attendant que le vent ne baisse et que les sauveteurs puissent intervenir.