Ch'tit récit d'un deuxième stage SIV ce week-end à Annecy...
Jeudi 17 Septembre2 jours avant la date prévue pour le SIV. Jusque là les prévisions météo pour le week-end étaient littéralement catastrophiques : grosses pluies, orages, vent…
Mais les bulletins du jour s’améliorent grandement, et je commence à y croire. Fabien de Flyeo qui va nous encadrer estime que c’est tout à fait jouable, nous confirmons donc la tenue de ce stage. En espérant qu’il pourra être réalisé complètement.
Samedi matinRendez-vous est pris pour 8h devant les locaux de Flyeo à Talloires. Fabien nous attend. Nous procédons aux vérifications matérielles, qui concernent principalement le parachute de secours. Chacun à notre tour nous l’extrayons de son container pour vérifier que « ça glisse ». Nous remontons le tout avec l’aide et les conseils de Fabien. En espérant bien sûr que nous n’aurons pas à nous en servir (du parachute, pas des conseils). Nous nous équipons également de gilets de sauvetage, et Cyril –qui assurera nos décollages– étanchéifie nos radios. Puis nous faisons un premier briefing avec Fabien, le but étant de définir un programme pour ce premier vol. Bien évidemment il n’est pas question que tout le monde fasse les mêmes exercices, certains seraient frustrés, d’autres en arrêt cardiaque.
Pour resituer, il s’agit là de mon 2ème stage SIV (enfin 3ème, mais les deux premiers n’ayant pas pu être complétés à 100% à cause de la météo, on peut considérer que je n’en ai fait qu’un). Donc pour celles et ceux qui hésitent à faire un tel stage, sachez que le programme décrit ici est un peu plus « engagé » que lors d’un 1er SIV.
Au menu donc pour ma pomme pour ce premier vol : des 360° engagés, avec contre rapide dans le but de sortir avec une belle énergie dans une grande ressource et de vérifier mon aptitude à la gestion de l’abattée, puis programme de fermetures asymétriques, contrées puis non contrées. Fabien veut contrôler avant d’aller plus loin que je maîtrise les bases (qui ont été travaillées lors du 1er stage, et régulièrement tout au long de mes vols depuis). C’est une bonne manière de se mettre dans le rythme et également de découvrir ma toute nouvelle voile dans ces configurations.
Me voilà donc en l’air. Pas d’appréhension particulière, puisqu’il s’agit là de choses que je pense –enfin j’espère !– maîtriser. Mais je me concentre tout de même. Les 360°, les fermetures, à droite, à gauche, contrées, non contrées… les exercices sont plutôt réussis et je file me poser sur le nouvel atterrissage SIV, juste à côté du port et du camping. Soit dit en passant, je le trouve bien plus confortable que l’ancien (le long de le route de Talloires) : long, relativement large, un peu plus à l’abri de la brise et surtout bien moins sujet aux déclenchements thermiques. Une « Rolls » quoi. Autre point positif sur ce vol, je suis de plus en plus confiant sur les réactions de ma voile, elle ne me paraît franchement pas méchante.
Tout le monde suit son programme sans difficulté notable et nous faisons un débriefing à chaud avec Fabien. Les exercices sont également bons pour lui, nous établissons donc le programme pour le 2ème vol. Ce sera toujours des fermetures asymétriques, mais cette fois dynamiques, puis accélérées. Il parait que c’est tout de même un peu plus énergique. Pas question donc de se laisser aller à la décontraction. Motivé, je décolle en premier. Et c’est parti pour les fermetures dynamiques. De quoi s’agit-il précisément ? Deux mouvements de tangage classiques, et dans l’abattée résultante aller chercher un élévateur avant pour fermer la voile d’un côté.
Tout va bien, pas de stress particulier, je m’attends bien sûr à un départ en rotation côté fermé mais je connais les recettes pour l’enrayer. En réalité j’avoue que je suis quand même bien surpris par la violence de la chose. Tant que la voile est dans son mouvement d’abattée tout va bien, c’est quand le pilote la rattrape, en début de phase de ressource et qu’il « pèse » sous sa voile que les choses deviennent plus « amusantes » avec des rotations rapides.
J’en réalise ainsi 4 à la suite, d’un côté puis de l’autre, et chaque fois c’est la même violence, qui m’arrache carrément l’élévateur des mains (c’est pas plus mal de toutes façons). Je parviens tout de même à contrer et enrayer les rotations relativement efficacement, avec parfois plus ou moins de difficultés (un demi-tour de twist, une cravate, ce genre de petits impondérables qui rajoutent un peu de piment…
).
Sur la toute fin du vol, il me reste tout de même un peu de gaz à cramer pour initier quelques « wingovers ». Comme à mon habitude, je les arrête bien vite par une belle fermeture côté extérieur. Va falloir les bosser (ça tombe bien, je suis là pour ça).
Je file me poser et observe les évolutions de Sébastien parti à ma suite. Son programme est le même : des fermetures asymétriques dynamiques. Sébastien vole sous une Avax XC2, voile exigeante et performante. Il utilise également une sellette cocon, ce « détail » n’en est pas un, Fabien a bien expliqué qu’il est dans ce cas hautement préférable de regrouper immédiatement les jambes sous la sellette en cas de « sketch ». Cela diminue l’inertie du pilote, tant mécanique que aérodynamique pour « suivre » la voile dans sa rotation. Sébastien envoie donc ses tangages, et saisit son élévateur dans l’abattée. Et boum, un bon 75% de la voile qui ferme ! Départ en autorotation, mais sans le pilote, donc twist (2 tours). Sébastien contre, la rotation est ralentie, la voile rouvre, mais le contre n’est pas assez fort car avec les 2 tours de twist plus moyen de piloter efficacement, la voile se met en 360° de plus en plus serrés. Il commence à se faire sérieusement centrifuger et préfère (avec raison) lancer le secours. Il a beaucoup de gaz au dessus du lac et parvient à affaler correctement son aile avant la rentrée dans l’eau. Fabien est là très vite sur place pour le récupérer. Plus de peur que de mal. Sébastien devra renoncer au 3ème vol pour jouer à un nouveau jeu : démêlage et séchage de son matériel.
En conclusion de ce 2ème vol un peu éprouvant (enfin surtout pour Sébastien), je retiens une chose importante : la Naspen, ben c’est pas la Golden (je l’aime toujours ma fidèle Golden). C’est quand même un sérieux cran au dessus, les réactions restent saines mais sont sensiblement plus marquées. Me voilà prévenu : il va falloir rester concentré sous cette voile pour la suite du stage et bien sûr dans ma future utilisation « quotidienne ».
Et pour le 3ème et dernier vol de la journée, Fabien m’invite à faire des « wingovers ». Il me rappelle et me ré explique le timing qui peut se résumer ainsi : appui sellette intérieur, commande intérieure, commande extérieure, bras hauts + neutre sellette… accélération… appui sellette intérieur… et ainsi de suite. Et c’est parti. Ces exercices sont plutôt bénéfiques également, et guidé parfaitement par Fabien, les « wings » commencent enfin à ressembler à quelque chose et à prendre un peu d’amplitude. Je parviens presque à reproduire tout ça sans radio, mais je manque encore grandement de précision dans ce « timing », dans mes placements sellette et aussi sur la commande extérieure (bref un peu sur tout !) et je me prends ainsi quelques petites claques. Mais le principe est vu, je grave les sensations dans ma petite tête pour pouvoir les retrouver tout seul plus tard.
La journée se termine par un sérieux débriefing vidéo dans les locaux de Flyeo, où Fabien met en lumière les défauts et erreurs de chacun (mais aussi les qualités rassurez-vous). Toujours très instructif. Mais il est temps de penser à se reposer… au dodo !
Dimanche matin 9hNous faisons bien évidemment notre briefing pour le 1er vol. L’étape suivante dans ma progression est évidente : ce sera le décrochage, qui sera le principal pré requis avant toute velléité de passage figure de voltige. Fabien nous explique le tout, toujours très précisément (je fais une parenthèse là-dessus et je dis « chapeau », parce que lors de tous mes vols j’ai revécu à 100% tout ce qu’il avait bien pu expliquer, sans rien omettre et avec une précision diabolique).
Et c’est parti. Cette fois-ci j’ai sérieusement le trac.
Cette manœuvre de décrochage me fait peur depuis bien longtemps, j’appréhende beaucoup la bascule arrière et surtout la réouverture avec les risques de « shoot » que cela implique (surtout avec ma nouvelle monture). Je laisse donc quelques compères passer devant moi pour essayer de retrouver ma sérénité. Et je décolle. La transition d’approche de la zone d’évolution se passe bien vite à mon goût, j’aimerais qu’elle dure, car j’avoue que l’idée de renoncer me traverse plusieurs fois l’esprit. Je regarde de loin les évolutions de Christophe qui me précède et suit le même programme, il s’en sort parfaitement et cela me redonne suffisamment de courage (merci Tof !).
C’est mon tour. Penser à respirer. Concentration. Freinage progressif et complet, mains aux fesses, et boum ça part en arrière. Tiens finalement ce n’est pas si terrible que ça cette bascule arrière. Par contre c’est fortement instable et physique, je me fais chahuter dans tous les sens mais reste bien concentré sur le verrouillage des commandes (très important !). Tout de suite heureusement vient le moment de faire la « reconstruction » de l’aile, toujours guidé parfaitement par Fabien, je tâtonne pour trouver la « marche arrière », ça se joue à quelques petits centimètres de débattement sur les commandes. Surtout rester bien symétrique. Heureusement l’aile se calme et se stabilise, même si ça chahute toujours un peu. Et victoire, la marche arrière est trouvée, les mains juste en dessous des maillons, mon bord de fuite devient mon bord d’attaque et inversement, et les bouts d’aile sont en oreilles inversées. Je sens également très clairement le vent relatif qui vient de derrière. Sensations étonnantes. Je reste ainsi quelques secondes pour « profiter » du moment. Mais il va falloir penser à retrouver la marche avant. Manœuvre délicate s’il en est, il faut trouver la bonne vitesse de libération et toujours surtout rester bien symétrique. Et puis bien sûr se préparer à stopper toute abattée. Je me fais surprendre sur la libération et remets du frein d’un côté (quelle drôle d’idée !). La voile shoote en biais, ferme un peu, mais revole finalement toute seule. Ouf. J’ai encore du gaz, Fabien m’invite à en faire un deuxième. Allons-y. Il se passe également pas trop mal, mais j’ai là aussi du mal à faire une belle réouverture. Rien de rédhibitoire, mais c’est à travailler.
Le 2ème vol de la journée suit le même programme : des décrochages. J’ai toujours un bon nœud au ventre lors du décollage et de la transition d’approche. Cette fois Fabien va me laisser me débrouiller tout seul, il n’interviendra qu’en cas de besoin. Et c’est parti, mains aux fesses progressivement, la bascule arrière, la remontée intermédiaire des mains pour trouver la marche arrière. J’ai bien repéré où elle était sur le précédent vol et je la trouve très vite. Je reste comme ça un peu, pas très sûr d’être bien stabilisé. Fabien ne dit rien. Et je dégringole, pas très motivé pour rouvrir (finalement on n’est pas si mal, je ne peux pas aller jusqu’à l’eau comme ça ?). Allez courage, je pense que je suis dans la bonne phase. Il faut que je pense à relever ces mains plus lentement et surtout symétriquement. J’y parviens, mais c’est un peu trop lent pour le coup. Content tout de même d’avoir réussi cela, c’était beaucoup plus propre que sur le 1er vol. Fabien reprend son guidage pour le 2ème décrochage, cette fois-ci je vais rajouter un mouvement de tangage préalable pour dynamiser la bascule arrière. Un peu échaudé par les « surprises » de la veille sur les fermetures dynamiques après tangage, je me contente d’un tangage relativement réduit sur une seule oscillation avant d’enfoncer les freins. La bascule arrière n’est toujours pas trop violente. La marche arrière est trouvée là aussi rapidement. La sortie toujours un peu lente et je me prends de petites claques sans conséquence en sortie. 4 décrochages en 2 vols, je suis lessivé, les « wings » que me demande Fabien pour achever le vol ne sont pas beaux du tout, je préfère en rester là et je vote pour l’atterrissage. Le nœud au ventre s’est nettement dissipé. Voilà une grande étape passée, je m’en faisais une montagne, finalement ce n’est pas si terrible que ça (je suis vivant), mais cela dit je n’ai pas l’intention d’en faire tous les jours au petit déjeuner !
Pour le 3ème et dernier vol de la journée, Fabien me laisse le choix du programme. Ce sera soit « wingovers », soit continuer à bosser le décrochage, soit la fameuse « SAT ». Ah ouais ? La SAT ? Vraiment ? C’est possible ça ? … réfléchissement … la SAT ! Explications détaillées de Fabien, avec gestuelle précise. Bon ça n’a pas l’air si terrible que ça. Le principal risque étant de partir en vrille au départ. Tout le reste me parait gérable et s’apparente à des 360° bien engagés.
Feu donc ! Au décollage, le trac est bien retombé, et les nuages qui bouchent la vue en nous obligeant à patienter m’aident à retrouver la concentration. Je décolle et me place dans la zone d’évolution.
Préparation : un tour de frein côté droit, la main gauche à la poulie en appui sur les élévateurs, un placement sellette à fond à droite avec un déhanchement maximum, et c’est parti pour une mise en 360° face à la planète. Je descends la main droite progressivement, ça accélère, ça centrifuge, la commande devient dure, j’insiste fort sur cette commande à l’invitation de Fabien, et très vite le mouvement se calme un peu et « s’inverse ». Je suis en SAT !
Là aussi sensations étonnantes, notamment de vent relatif. La centrifugation n’est pas si forte, par contre le maintien de la commande et de la position à la sellette est très physique (il s’avèrera à la vidéo qu’en fait je n’étais pas assez déhanché). La sortie se fait en relevant la main droite, l’aile se remet en 360° face à au sol (ou à l’eau si vous préférez), un petit contre et c’est la sortie en chandelle « classique ». Yeepeeh !! Mais pas le temps de savourer, Fabien me guide pour en placer une deuxième… « Same player shoot again »… La deuxième est également réussie. Après ces émotions fortes, je me pose euphorique !
Et voilà... c'est déjà la fin... ces 2 jours et ces 6 vols sont passés à la vitesse de la lumière !
En conclusion, je suis ravi d’avoir pu titiller ma voile (je l’aime ma Naspen verte), de m’être rassuré quant à mes réactions de pilotage dans les situations délicates, d’avoir pu passer ce cap psychologique difficile du décrochage, et de m’être au final bien fait plaisir avec la SAT. HEU-REUX !
