Cette année j’ai deux gros objectifs : la Dolomiti Superfly avec Damien Lacaze et les championnats de France à La Réunion en Novembre prochain. J’ai commencé à les préparer durant le lockdown. Enfin pas tout à fait. Au moment du confinement je ne connaissais pas encore Damien !
En vrai, l’année 2020 devait être (deux points ouvrez les guillemets) l’année des compétitions à l’international
(sourire amer ? Soupir ?) pour faire des points au classement WPRS (mouhahahaha = rire diabolique).
J’avais obtenu une Wild Card per il trofeo Montegrappa. Je devais aller en Roumanie pour une Pré-Coupe du monde avec les filles pimentées du groupe de ligue et finir en apothéose avec les CDF.
Et puis le Covid est arrivé. Et le confinement. J’ai commencé à faire du dénivelé pour m’aérer, en me disant que ça ferait du muscle pour pousser le barreau et de la rési pour tenir des heures en l’air. Je me suis posée la question de m’inscrire à l’Airtour. J’ai lu « Course Poursuite à Travers les Alpes ». J’ai pensé que l’Airtour à peine sortie du confinement c’était peut-être pas l’idée du siècle. J’ai continué à faire du dénivelé.
Pour échapper aux éventuels contrôles, je partais hyper tôt le matin, à la frontale que j’éteignais dès que mes yeux de myope s’étaient habitués à l’obscurité. Et puis à un moment donné dans la montée, je me retrouvais enveloppée d’une lumière magique et incroyablement douce : les premiers rayons du soleil
je regardais la Chartreuse se parer de reflets dorés et j’ai vu comment Chamechaude était la première à obtenir les faveurs d’Hélios. Je pensais alors aux thermiques que ça donnerait plus tard dans la journée.
Les thermiques. Tous les jours ou presque j’ai vu des rapaces les enrouler avec une efficacité qui me laisse à chaque fois songeuse.
J’ai fait du yoga. J’ai alterné les séances de stretching avec du renforcement musculaire. J’ai entraperçu mes quadriceps se redessiner. J’ai appris à enchaîner les tractions et les pompes avec mon personal lover euh trainer Tommaso. J’étais en forme.
Le déconfinement progressif est arrivé et avec lui son lot d’incertitudes et de souffrances. Inflammation - Dépression. Le cercle vicieux ultime.
J’ai vu mes mains se transformer en pierre et s’éroder comme des ruines de Mésopotamie. J’ai vu des ronces de métal m’encercler les chevilles et leurs épines s’enfoncer dans ma peau fine. J’ai vu tant de noirceur en moi que même toute l’encre de Chine ne suffirait pas pour la décrire.
Heureusement j’ai aussi vu des oiseaux se poser sur mes poignets et mes mains retrouver leur mobilité. J’ai dansé pieds nus sur du parquet à enchaîner les pirouettes et les pas chassés. J’ai vu le ressac des vagues emporter mes pensées sombres et mes grands-parents m’enlacer en me disant que tout irait bien.
J’ai lu beaucoup. Le livre de Maxime Bellemin disait « exercices ciblés ». Quand il a été possible de regrimper, j’ai remis les chaussons. L’escalade a deux bienfaits principaux (dans un programme d’entraînement vers la performance - parce que sinon elle en a plein d’autres) : travailler la musculature du haut du corps ; travailler le mental. Mon mental de fiotte. Je faisais un 6B en moule et je n’arrivais pas à la chaîne en tête sur un 5B. Houston on a un problème.
Je me revois à Saint Hil appeler Charlotte en larmes, lui disant que j’allais devoir arrêter le parapente parce que j’avais trop peur en l’air. Dans mon carnet de vol est apparue une nouvelle donnée (en plus de la Vz Max du jour, du nombre d’heures, etc...) : le pourcentage plaisir / peur. Sur les premiers vols à la sortie du confinement on était sur du 10-30% de plaisir vs. 90-70% de trouille bleue. Et puis le stage Cross avec Damien Lacaze est arrivé.
Damien je l’avais aperçu sur la scène des Icares du Cinéma présenter son aventure avec Antoine Girard. Mais je l’ai surtout connu, comme beaucoup, grâce à ses vidéos aussi hilarantes qu’instructives de PWCA. Alors bien sûr j’ai adoré ses Tutos Pour les Jean-Jo créés pendant le confinement. Alors je lui ai dit. Je me suis fait expliquer la finesse au goal et de fil en aiguille, je me suis retrouvée à organiser deux stages cross pour mon club.
Piano piano, le pourcentage de plaisir a repris du poil de la bête dans mes incursions aériennes. Mais le processus de guérison est long. Dur dur d’être bien sous une voile quand on n’est pas bien dans sa tête.
Revoir ses ambitions à la baisse. Chercher le plaisir avant tout. Se faire confiance. Ici je voudrais remercier Jef et les Piments d’elles (Charlie et ses anges
) pour m’avoir aidée à poser les bases de ma reconstruction. Merci!
Damien m’a proposé d’être son assistante sur la Dolomiti Superfly 2020. Est-ce pour mon sens de l’organisation ou bien mon sens de l’humour ? ou alors pour ma connaissance du Trentino ? ou peut-être ma maîtrise de la langue de Dante ? Ou tout simplement parce que tous ses potes compétents en la matière n’étaient pas dispo ?
toujours est-il que sa demande a été une grosse surprise et que sans grande surprise j’ai rapidement accepté.
Depuis le temps que je tanne ma copine Lily pour lui faire l’assistance sur une course de marche et vol ! C’est d’ailleurs la première personne que j’ai appelée après avoir raccroché avec Damien. Mais maintenant j’y vois clair : elle me laisse apprendre avec Damien pour qu’on s’aligne toutes les deux sur la X-Alps 2023
Préparation spécifique pour être une bonne assistante :
- faire du dénivelé. C’était mieux durant le confinement. Il a fait tellement chaud ces dernières semaines ! Les « au moins 3000 m/semaine » se sont rapidement transformés en « au moins 1h par jour »
- J’ai acheté des nouvelles chaussures (qui vont vite et trouvent les sentiers) à Trento (comme ça elles connaissent déjà le coin).
- J’ai fait de la gestion de conflit (je me suis engueulée avec mon frère et ma sœur et après on s’est réconciliés
)
- J’ai optimisé mon bronzage short-chaussettes
- J’ai fait 7h30 de bagnole en une journée pour soutirer des informations au meilleur parmi les meilleurs : Christian Maurer (CLASSIFIED 🤐)
- J’ai appris à me servir d’Alpine Quest (et je me suis trompée de sentier
)
Bref, je viens de passer une semaine
in Abruzzo. J’ai découvert une région magnifique. J’ai vu des étoiles filantes. J’ai couru (un petit peu) dans des montées et des descentes. J’ai fait un 6A en tête. J’ai fait la sieste. Ah et puis j’ai dû prendre au moins 5 kg 😅 je dirais que je suis fin prête pour cette Dolomiti Superfly 2020.
Bon en vrai, j’ai vraiment des kilos en trop, j’aurais voulu être plus affûtée aussi bien physiquement que cartographiquement, je traîne un peu d’inflammation mais l’heure est venue ! ça y est on arrive à Trento ! j’ai l’envie de découvrir les coulisses d’une course de marche et vol et aussi l’envie de faire de mon mieux. Pour sûr il y aura un Avant et un Après la Dolomiti. Et j’en suis profondément heureuse. What else?