Il faudrait d'abord savoir ce qu'est un bon pilote.
Est-ce que c'est un pilote qui sait faire plus de xxx kilomètres? Celui qui sait rentrer l'infinity tumbling twisté? Celui qui maîtrise sa voile au déco comme personne?
Celui qui dans son approche personnelle du parapente sait y trouver à chacun de ses vols un plaisir merveilleux?
Chacun aura sa définition. J'aime bien la dernière, finalement elle fonctionne et parle à tout le monde quelle que soit sa pratique.
J'ai pu lire quelque part un avis de quelqu'un qui juge que souvent un vieux pilote ne fait plus autant de gonflage qu'à ses début, ne décolle plus aussi bien, n'a plus autant de ressenti qu'à ses débuts, et que par conséquent
il n'est plus autant un bon pilote. Je ne sais pas si c'est vrai mais en tous cas ça peut faire réfléchir un peu.
J'ai croisé dans une navette un gars très sympa qui, en lui posant des questions, m'a confié qu'il avait commencé le parapente par du gonflage intensif:
400 heures de gonflage au sol avant de faire son premier grand vol... Il a rincé sa première voile au sol.
Et il continue à faire du gonflage intensivement en parallèle de ses vols.
Alors certes, c'est un pilote qui pratique l'acro, mais ça me trotte encore beaucoup dans la tête...
Voilà une idée un peu naïve de la représentation que je me fais d'une pratique (et j'imagine que ça marche un peu avec tout):
Comme dans un jeu de rôle on peut imaginer des aptitudes, des "caractéristiques" qu'on peut définir et évaluer:
A=niveau de gonflage au sol
B=niveau de pilotage en l'air
C=niveau de pilotage distance
D=niveau de prise de décision
E=niveau de mental en air calme
F=niveau de mental en conditions fortes
G=niveau d'analyse météo avant vol
H=niveau d'analyse méteo et observation pendant le vol
I=niveau d'approche et atterrissage
J=niveau de gestion de sa voile hors domaine de vol (niveau d’expérience sur vracs).
... etc
On peut identifier autant de catégories et aptitudes nécessaires en fonction de sa pratique, sans pour autant définir de niveau de priorité entre chaque aptitude.
Dans le cas de pilotes orientant leur pratique vers la distance, j'ai observé à plusieurs reprises des pilotes extrêmement doués dans certaines de ces catégories: car ils sont par exemple restés souvent sur le site de leur décollage, sans pour autant oser "partir" très loin, ils ont pourtant acquis un beau bagage de "feeling" de leur voile, de gonflage au sol, de reposé au décollage.
Pourtant ils n'ont pour certains jamais fait de cross de plus de 20 ou 30 kms.
Est-ce que ceux qui ont fait 100 ou 150Kms de distance sont meilleurs qu'eux?
Le pilote qui au contraire dès ses débuts aura aligné des décollages tardifs assez fortement alimentés et des vols de distance toujours plus longs et impressionnants pourra facilement obtenir une aptitude "vol de distance" très élevée, alors que toutes les autres aptitudes sont restées très basses.
Certains pilotes arrivent à faire 100 ou 150Kms dès leur première ou seconde année de pratique.
Je me représente alors un écart très important entre cette aptitude record sur une ou plusieurs catégories ayant permis ces exploits, et l'ensemble des autres catégories qui semblent pourtant indispensables.
A l'inverse, le pilote dont je parlais, et qui a engrangé des années de "petits" vols plus ou moins en local en augmentant progressivement l'ensemble des aptitudes permettant des vols sereins, n'aura sans doute plus qu'à apprendre à progresser dans les aptitudes "distance" (toujours dans l'exemple de ce type de pratique) et sans doute voler à partir d'une base bien plus saine.
J'ai bien aimé aussi certaines remarques sur ce forum, de certains pilotes qui préfèrent faire des vols rando en air calme et contemplatifs et qui se considèrent pourtant comme de "simples" pilotes.
C'est exactement pareil, et si le plaisir est là, je ne vois pas en quoi le pilote serait moins bon (et sans doute au contraire), d'autant qu'il y a d'autres aptitudes à avoir et pas forcément les plus simples (marche d'approche sur glacier, gestion du matériel, savoir renoncer, gestion des émotions et de la fatigue, conditions météos en situation extrême...).
Pour moi, quelque soit le niveau du pilote et ses différentes aptitudes, le meilleurs pilote c'est celui qui a sût éprouver le plus intense des plaisirs sur son vol sans s'être mis en danger.
Un pilote qui aura fait un vol du soir splendide et qui atterri avec les larmes aux yeux aura pour moi bien plus de valeur qu'un vol "perf" calculé et anticipé, mais où le pilote aura pris des risques démesurés pour ne pas faire moins bien que son précédant vol.