Je ne comprends pas comment des gens intelligents peuvent être pour le nucléaire, pour moi c'est aussi incompréhensible que la religion.
J'ai lu des choses pertinentes sur ce fil et comme d'habitude c'est Marc qui est le plus pertinent, donc le plus proche de ma pensée.
Moi aussi j'étais à la grande manif européenne contre le surgénérateur de Malville en 77, j'étais rentrée des Dolomites un peu plus tôt pour pouvoir y participer, avant de "descendre" grimper aux gorges du Verdon.
C'était sous Giscard et ce grand escogriffe, ancien X dévoyé passé par l'ENA, se croyait intelligent et compétent dans les questions technologiques, il avait été le relais du lobby nucléaire sous les présidences précédentes en tant que ministre des finances.
Compétent et intelligent ? L'affaire des avions renifleurs et du surgénérateur firent justice de ces illusions, c'était un imbécile et son dernier exploit (le texte "constitutionnel" de 2005) le fit passer définitivement dans une sous-catégorie des imbéciles que je me garderai bien de nommer, Brassens l'évoquant en périphrase sous le terme "une foule de gens".
On devrait toujours réécouter Brassens.
Un peu d'HistoireJe lisais ces jours derniers dans La Recherche un article sur Enrico Fermi, l'inventeur / concepteur du 1er réacteur nucléaire, qu'il dirigea à Chicago. Enrico Fermi, Leo Szilard ou Frédéric Joliot croyaient qu'ils tenaient là la technologie du futur, qui allait libérer l'humanité de la pollution du charbon et l'affranchir du manque de pétrole... et en même temps ils avaient bien compris qu'il y avait des applications militaires évidentes et ils savaient qu'à Berlin leur collègue et ami Werner Heisenberg conduisait les mêmes recherches qu'eux. Ce fut le point de départ de leur pression sur tonton Einstein pour demander à Roosevelt de lancer le 'projet Manhattan".
Fermi avait découvert que sa "pile" produisait des saloperies qu'il ne pouvait pas identifier et ce furent des chimistes très pointus qui mirent un nom sur tels "déchets" radioactifs, certains étant de nouveaux éléments à inscrire dans la table de classification.
Quand il était encore en Italie, le nouvel élément découvert fut baptisé "mussolinium" mais Fermi - qui était anti-fasciste - fit observer que donner le nom du Duce à un élément aussi peu durable ne serait pas lui rendre hommage, et l'idée fut abandonnée.
Il partit un peu plus tard assister à un congrès aux Etats Unis et il "oublia" de rentrer en Italie. Heisenberg n'eut pas cette possibilité et dut rester en Allemagne, il est fort probable que c'est grâce à lui que les recherches allemandes sur la fission n'aboutirent pas, tant il persista à les orienter dans une direction qu'il savait sans issue.
La "bataille de l'eau lourde", grosse manip d'intox, conforta les dirigeants nazis dans l'illusion que Heisenberg était sur la bonne piste. Les Alliés n'en savaient rien et quand ils arrivèrent à Spandau ils avaient surtout envie de mettre la main sur le stock d'uranium avant les Soviétiques. Ils capturèrent Heisenberg sans difficulté, il les attendait avec tous ses papiers.
Ouf !Les centrales nucléaires ne sont pas plus que des grosses marmites à produire de la vapeur sous pression, laquelle une fois détendue actionne des turbines qui entraînent des alternateurs. Il n'y a rien de magique là-dedans, c'est de la technologie très rustique avec un rendement assez médiocre.
Le réacteur lui-même n'est pas très différent du principe de Fermi, Szilard et Joliot : un élément radioactif naturel fissile se fragmente spontanément en deux radio-éléments plus petits, avec une libération d'énergie liée à une perte de masse, selon la loi d'Einstein E=mc².
Si la masse de l'élément fissile est assez grande, la réaction s'auto-entretient... et soit on ralentit les neutrons et cela ne produit que de la chaleur, soit on les laisse casser tranquillement d'autres noyaux, ce qui libère d'autres neutrons, et en une fraction de seconde cela fait BOUM.
Un peu d'HistoireLes Américains avaient construit deux prototypes de cette bombe à U235 et l'un d'eux fut essayé dans le désert d'Alamogordo au Nouveau Mexique, l'autre fut largué sur Hiroshima le 6 août 1945.
Ils avaient observé qu'un déchet de la "pile" de Fermi était fissile avec une masse critique plus faible et ils l'avaient nommé plutonium. Une seule bombe expérimentale avait été construite (fat man) et elle fut larguée sur Nagasaki le 9 août.
Il n'y en avait pas d'autre mais les résultats des deux bombardements furent si effroyables que la menace d'en larguer une autre sur Tokyo mit les Japonais à genoux et donc fin à la guerre.
Cela fit aussi réfléchir Staline.Les prix Nobel qui inventèrent l'énergie nucléaire ne furent pas tout de suite conscients de ses effroyables dangers et les gugusses qui, autour d'un président malade et de culture scientifique nulle, lancèrent la France dans cet ignoble industrie d'apprentis sorciers, avaient des connaissances assez importantes des risques mais se croyaient capables à court terme de les maîtriser grâce au "retraitement" des déchets.
Les pessimistes et les réalistes, comme les 100 000 manifestants de Morestel et Arandon en 77, venus de toute l'Europe, savaient très bien que le risque était ingérable sur le long terme et qu'il serait impossible de l'assumer sur des centaines de milliers d'années, donc qu'il fallait arrêter tout de suite.
Le lobby du nucléaire a encore la vie dure 40 ans après, malgré Three Mile Island, Sevtchenko, Winscale, Tchernobyl et Fukushima.
La France est donc nucléaire et cela rend nos voisins nerveux mais les Français s'en foutent, complètement désinformés depuis un demi-siècle.
Le lobby du diesel est tout aussi puissant et la France est diéselisée à 80%, avec la pollution niée par les "autorités" et la croyance bien ancrée dans les mentalités que le diesel ne pollue pas.
Au fait Marc, tu roules diesel ou essence ?
On ne se tirera pas comme ça du nucléaire et de tous les déchets qu'il produit, cela va coûter infiniment plus aux générations futures que cela ne coûta à celle (la mienne) qui paya pour la construction de ces saloperies.
Une fois encore, la raison vient d'Allemagne : certes nos voisins ont remis en route des centrales au charbon, qui produisent du CO2 et de l'effet de serre, mais c'est une transition. A terme, l'Allemagne sera entièrement convertie aux énergies renouvelables.
En France, on a la tête dure et le bonnet (ou le képi) bien enfoncé dessus et c'est un autre grand escogriffe "intelligent et compétent", un certain Chirac (passé lui aussi par l'ENA) qui fit des pieds et des mains pour que le réacteur de recherche ITER fût construit chez nous.
Encore du fric englouti dans un projet pharaonique sans issue, aux seules fins - pour les observateurs - de démontrer justement que la fusion nucléaire ne pourra jamais être maîtrisée à des fins industrielles.
Dans ma jeunesse, il y avait un mouvement antinucléaire appelé MCAA (Mouvement Contre l'Armement Atomique) dont le logo fut capté par les mouvements "peace and love".
J'avais 17ans, cela vous étonne si j'y avais adhéré ?