NON !Un enseignant est d'abord un rebelle parce que son métier est d'ouvrir l'esprit des jeunes et de leur apprendre comment le monde fonctionne, alors que les "chefs" du ministère cherchent surtout à éviter toutes formes de vagues et à répandre un mode de pensée épouvantablement conformiste.
Les syndicats sont si conformistes, si intégrés dans le moule, qu'ils ne représentent plus personne, mais c'est avec ces fossiles que les "autorités" vont discuter.
J'ai été prof pendant 36ans dont 30 dans des bahuts classée ZEP / sensibles de banlieues bien pourries, avec des "sauvageons" (pour reprendre le mot d'un ministre débile) ingouvernables mais qu'il fallait cependant tenter de faire progresser.
Je n'ai connu qu'un seul chef d'établissement qui fût vraiment un chef. Sous sa direction, le bahut "tournait" bien et aucun prof ne demandait de mutation. Les mômes étaient aussi nuls et aussi durs qu'ailleurs mais il y avait une équipe très soudée pour s'en occuper. Je suis restée 18ans dans ce bahut, et quand notre "patron" bien-aimé a pris sa retraite ce fut très vite un bordel pas possible.
Nous étions entrés en enfer et j'ai fini par foutre le camp moi aussi, pour un bahut parisien réputé "difficile" où je me suis sentie au paradis.
Les "affreux", je savais les gérer... et j'y ai aussi rencontré des classes merveilleuses et des élèves merveilleux, comme à mes débuts.
Par contre, au niveau de la direction... heu... cela ne valait pas grand chose. Je me rappelle avoir suggéré à ma proviseure un aménagement des horaires de ma discipline (physique-chimie) pour améliorer le rendement et faire mieux passer cette discipline réputée difficile.
- ce n'est pas dans les textes.
- les textes, je m'assois dessus, ils sont nuls au ministère et ce qui m'intéresse, moi, c'est l'efficacité.
- en tant que chef d'établissement, je ne peux pas transgresser les textes.
- un chef doit d'abord savoir désobéir, dixit un certain De Gaulle.
C'est pour ça que je n'ai pas voulu devenir chef d'établissement, parce que je ne sais pas obéir à un ordre idiot. J'avais quand même passé une fois le concours de recrutement, pour voir, et j'avais très vite vu : les copies n'étaient pas anonymes, autrement dit c'était non seulement illégal mais les résultats étaient juridiquement non valides.
Une honte.
A l'armée, j'avais refusé l'école d'officiers de réserve et quand je fus incorporée le capitaine voulut m'affecter au peloton d'élèves gradés.
- Non mon capitaine, je refuse.
- Quoi ?
- Oui, je refuse. Je n'ai jamais su obéir, ma mère me tapait dessus et au lycée je passais tous mes samedis après-midi en colle. Incapable d'obéir, je serais totalement inapte à donner des ordres autant qu'à les transmettre. Je finirai 2e classe mais je vous demande quand même de m'affecter à la section des éclaireurs.
Ce capitaine était un mec intelligent et il fit comme je lui demandais.
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Je me suis engueulée plusieurs fois avec des cons qui m'emmerdaient, des chefs d'établissement et même un inspecteur. Ce n'est pas idéal pour avoir de l'avancement mais personne ne m'a jamais fait faire la carpette. Cela me valut même une fois une convocation par le Recteur, un excellent souvenir. Une heure avant de partir à ce rendez-vous, j'avais eu au téléphone la dominatrice chez qui il avait ses petites habitudes de soumis, hihihi... entre maîtresses cela se passait bien et le cher Recteur ne tint pas la route face à maîtresse Viviane. Il s'imaginait peut-être recevoir un prof contrit et tremblant pour son avenir ? Il eut en face de lui une des dominatrices les plus connues des soirées parisiennes et après une passe d'armes entre gens bien-élevés je le mis sans mal dans ma poche.
J'en rigole encore 25ans plus tard.
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Quant aux "grèves" symboliques d'une journée de temps en temps, j'ai toujours considéré que cela faisait faire des économies au ministère et je n'y ai jamais participé. Par contre, quand fillon s'attaqua à nos retraites en 2003, je fis partie des 100% de grévistes de mon lycée, toutes catégories confondues. Les lycées Balzac (le mien) et Voltaire étaient les deux plus "virulents" de Paris.
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J'ai croisé des centaines de profs / carpettes bien soumis et obéissants et en 36ans je ne me suis fait aucun(e) ami(e) dans ce milieu de petits-bourgeois vivant dans un cocon depuis l'enfance : école / collège / lycée / université / enseignement.
Ces gens ne connaissaient pas le monde, n'avaient jamais travaillé, ne connaissaient rien aux autres mais se la pétaient en affichant des compétences qu'ils n'avaient pas.
Quant à leur inculture, elle était abyssale.
Quand je m'entendais bien avec tel ou telle, c'était toujours des petits personnels non enseignants, des gens non prétentieux avec qui échanger était un plaisir. Nous eûmes ainsi une assistante de cantine, poste bien modeste, nommée préparatrice des manips des labos de physique et sciences-nat. C'était une personne intelligente et nous lui apprîmes le métier et ce qui va avec, elle fut reçue haut la main au concours qui la titularisait.
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Je me rappelle aussi une grève agressive menée parce que fin novembre nous n'avions pas encore été payés et que les syndicats ne faisaient rien. L'Inspecteur d'Académie ne voulait pas nous recevoir, alors nous y étions allés avec nos élèves et une fois à l'étage cela avait été brutal : "vous avez une minute pour nous recevoir ou nous lâchons nos 90 garnements dans les bureaux."
L'inspecteur avait mangé son chapeau et deux jours après nous avions la paye et le rappel des mois précédents.
Pour mettre en oeuvre une opération-commando de ce style, il ne faut pas être béni-oui-oui ni soumis à l'autorité.
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J'en appelle à la mémoire de Louise Michel.