Je comprends… Ces planches sont consacrées à la gestion de l’abattée de sortie du décrochage provoqué par une fermeture frontale.
Quel rapport alors ?
Leur intérêt est qu’elles illustrent l’influence que peut avoir ce que l’on a appelé à tort « le freinage » sur l’équilibre longitudinal d’une aile car sur des parapentes modernes, les commandes forme des volets de courbure et créent de la portance, comme Olivier C nous l'a démontré plus clairement que personne ne l'avait fait auparavant.
Abaisser rapidement les commandes à partir d’une position bras hauts ou accélérée va donc 1-accroître la portance 2- reculer le centre de poussée, ce qui devrait favoriser un mouvement à piquer.
Et pour être complet sur le sujet on va maintenant parler… DÉCOLLAGE !
La majorité des profils grands public ont tiré leur accessibilité du fait que le profil de leur bord d’attaque avait un rendement médiocre à incidence élevée et qu’ils étaient très centrés avant.
Pour l’expérimenter, il n’y a (encore une fois) rien de mieux que le contrôle au sol pour comprendre le caractère de l’aile que l’on a au-dessus de sa tête : en observant et apprenant à contrôler et maintenir son aile pleine fenêtre puis au-dessus de soit dans une brise établie :
Cas N°1
Une aile facile (typiquement une EN-A très sage) va monter progressivement, accélérer avant d’arriver à la verticale du pilote où elle va ralentir en le prenant en charge sous l’effet du couple à cabrer produit par son franc centrage avant (le centre de poussée passe brièvement au-delà de la verticale pilote).
Le pilote n’a pas ou peu d’action aux commandes à produire pour enchainer tranquillement avec sa course d’élan, le profil se stabilisant seul si le pilote a le bon goût de charger progressivement sa ventrale en engageant le buste par-dessus, et de courir plus sur la boite de ses pieds et genoux près du sol (propulsion par succession rapides de rebonds élastiques en arrière du corps) plutôt que sur ses talons (j’en vois qui rigole… Et pourtant… Quel spectacle sur les sites… dont nombre de cocons-cuisinées en panoplie de la « fashion-victim » complète).
Et s’il a la flemme de courir, un petit coup de frein « salvateur » l’arrachera du sol.
Cas N°2
Pour reprendre l’exemple de Laurent, une voile de loisir à connotation sportive, typiquement une C assagie ou une « fausse B» (par exemple la Nyos RS pour ceux qui ne l’aurait pas encore compris… mais je m’égare) va au contraire avancer d’autant plus que son pilote appliquera le poids de son corps une fois l’aile arrivée au-dessus de sa tête (Nota : la particularité de la Nyos est de « trainer » sa jupe arrière qui va se gonfler avec retard, amortissant le « shoot »).
Tout l’art du pilote sera de refuser sa charge à son aile, en marchant vers elle pendant sa montée, en abaissant ses commandes pour former un large volet qui lui permettre de s’équilibrer en girouette en « savonnant » à peine une dizaine de degrés en arrière de la verticale pilote.
Une fois le buste engagé sur la barrette de poitrine, les chevaux arrivent rapidement et l’aile « vrombit »… le pilote n’a plus qu’a courir… en accélérant aussi rapidement qu’il le peut pour accompagner la cavalcade de son aile, mains basses en arrière au début du mouvement, ce qui aura tendance à garder la voile au sol en favorisant une assiette à piquer dans la pente pour placer le plus de foulées possibles -toujours en accélération- puis en relevant progressivement les mains pour décoller à la vitesse de finesse maxi, avec une jolie ressource… qui vous ramènera immanquablement au même niveau que celui où vous avez quitté le sol ! Oh… Yeah (effet garanti auprès des touristes… mais aussi gage de sécurité car l’aile a toute son énergie et son meilleur rendement, est bien équilibrée là avec les commandes exploitables à leur plein débattement là où on en a le plus besoin… Car le sol est juste là, encore proche ! Et que le 1er thermique de la journée et le cisaillement qui l’accompagne sont peut-être juste devant, tapis dans leur invisibilité.
Vous avez bien noté que c’est carrêment l’inverse de la séquence de pilotage de la voile du cas N°1.
Non ? Relisez…
Et bien, les entrées en thermique, c’est strictement PAREIL ! Donc pas du tout la même chose entre :
1- une EN-A centrée avant qui n'accélérera pas -ou même cabrera- en entrée de thermique sous l'effet d'une rafale verticale, montant parfois rapidement du fait du temps passé dans la bulle rencontrée, qu'elle mettra plus de temps à traverser... tant qu'elle n'en sort pas sous le vent !
2- une EN-C (ou B+) sportive qui mordra naturellement dans le thermique (pas besoin d'un shark nose pour cela, comme on vous l'a expliqué) en abaissant momentanément son assiette sous l'effet de l'accroissement instantané de sa charge et du rendement de son profil à faible incidence, favorisant une mise en virage rapide avec un minimum de perte de vitesse, garantissant le meilleur fonctionnement de l'ensemble de ses profils sur toute l'envergure, et un cadencement précis, apte à ressentir et "décortiquer le thermique au coeur de celui-ci" (Copyright Gaby T. pour Parapente+).
Alors, faut-il regretter que l’on puisse se mettre « debout sur les freins » sous une A en entrée de thermique sans que celle-ci ne bronche, pilote pendu aux avants ?
Non... Car si ça marche, pourquoi s’en priver ?
Mais en fait OUI !
Car si l’on s’habitue à voler ainsi, on ne comprendra pas pourquoi on prendra un jour l’aile sur la tête.
Un jour de « trop bonnes » conditions comme ce peut être un jour de conditions « moisies », votre voile « béton » va bêtement en voir trop pour elle !
Et faire une grosse frontale ou même décrocher, simplement parce que votre incidence aura dépassé tout ce qu’elle peut supporter, qu’elle se sera tellement cabrée qu’elle se verrouillera ainsi, inerte à vos ordres aux commandes-comme gelées- si vous ne lui lâchez pas rapidement (mais sans brutalité) la bride… Ou bien décrochera immanquablement au premier cisaillement descendant…. Avec frontale à la clé, sketch et… tout ce que vous pouvez imaginer de plus mauvais si la malchance d’un twist ou autre méga-fermeture s’y met – parce que ça ferme aussi une A !
De la même façon qu’une aile très amortie peut se verrouiller en restant collée au sol dans une brise forte, dans une rafale thermique ou un vent qui fraichit soudainement. Ou bien bondir vers l’avant comme jamais vous ne l’en auriez jamais cru possible d’une aile aussi « sage »… dans 99% des cas.
C’est en cela que voler sous une aile A sans travailler constamment avec un moniteur pour acquérir les bons réflexes d’un pilotage actif (notamment en apprenant à utiliser au minimum les commandes pour conserver sa vitesse de finesse max et même mettre en œuvre l’accélérateur en vol thermique pour corriger l’assiette de l’aile et conserver la meilleure incidence possible du point de vue rendement du profil) peut s’avérer à la longue dangereux si l’on est de tempérament aventureux !
L’habitude d’un pilotage « absent » peut endormir la méfiance et la vigilance qui doivent prévaloir face à la complexité des phénomènes aérologiques que l’on aborde pour la première fois avec « la fleur au fusil ».
Les conditions fortes, c’est la guerre… pas la chasse au lapin de garenne. Sortir le drapeau blanc, se mettre « haut les mains » pour laisser l’aile faire seule le boulot pourrait alors ne pas suffire.