7 avril 2015 : 4 semaines et demi d'arrêt complet, 5 semaines après l'atterrissage forcé au Tiz-n-Test, me revoilà au déco de bar sur Aube à 13h, vent modéré plein axe, un beau ciel bleu, des cumulus de la même couleur. Une voile en l'air, je descend prestement de la voiture, hume l'air vivifiant, regarde la pente, le ciel, la
, les flammèches, ça sent bon le vol de reprise. les prévisions météo sont bonnes.
Je sors mon sac poussiéreux, poussière du Maroc, le sac saucisse est content de s'étendre sur de l'herbe verte et porte aussi les stigmates d'une semaine passée dans le "désert". Je prépare ma voile un peu ternie également, une vraie baroudeuse, aucune suspente emmêlée ! Ca va vite, elle est bien cette voile avec le temps, elle a pris un air buriné, fidèle au poste malgré les mauvais traitements subis. Je me prépare méticuleusement, comme chaque fois, je suis prêt. 4 autres pilotes se préparent. Un (copain) est déjà reparti en l'air, décollage un peu bizarre car il a plongé vers le bas avant de remonter et là bien haut. Je mets en bouchon et me dirige vers la butte. Aucune émotion, aucun souvenir du passé. Je suis dans le moment présent. J'étale un peu ma voile, l'installe. Petit pré-gonflage, tout me revient, les gestes, les automatismes, les flammèches s'agitent plus ou moins vite selon les thermiques qui passent. Je dis à un pilote avec son Alpina 2 qu'il peut y aller. Je prends mon temps. Il joue avec le vent avant de prendre son envol. C'est bon j'aurais des points de repère pour les thermiques.
Je pré-gonfle deux fois, la voile monte mollement, elle retombe, allez hol la troisième fois c'est la bonne, je l'ai décidé, tous les voyants sont au vert. La voile monte tranquillement, je me retourne tout de suite, équilibre la voile et deux pas et je décolle, ça monte vite. Les premières minutes sont déconcertantes, ça monte et ça descend c'est inégal. Puis je trouve mon altitude, je commence à faire du soaring et ça monte régulièrement. Je regarde la voile, je remercie Dieu (ou la nature pour les non-croyants) d'être là au soleil
, dans le ciel, comme si rien ne s'était passé. pas de douleur, la ceinture me tient bien les reins (mais c'est psychologique je suppose). Le vario commence à se manifester. Cela va du soaring tranquille aux poussées dans des petits thermiques nerveux et étroits, puis ça retombe. je repère les endroits, les autres voiles, je ressens ce que je peux ressentir, des fois je me crispe. Penser aux fondamentaux "reste sous ta voile, ressens les commandes, les mouvements de la sellette, fais corps". Pas évident au début, tout revient comme si c'était familier et étranger. Sensation bizarre d'être à la fois dans le connu et l'inconnu. Je commence à prendre mes marques, je suis déjà un peu plus haut que certains. Pas de compétition, ce n'est pas une compétition. J'essaie de me concentrer sur ce que fait la voile mais des fois les thermiques me poussent très fort, heureusement que je reste bien devant, une énorme marge de sécurité. A un moment, je me fais enlever par un thermique qui rejoint d'autres thermiques d'une manière incroyable.
Je grimpe de plus de 400 m en quelques minutes. Là je commence à prendre peur
, mais il va pas s'arrêter de brailler le vario, allez je sors du thermique, ça chute grave, alors je reviens et je monte, je monte, l'altitude et le fait de voir la terre s'éloigner le village devenir plus petit ne me fait pas peur, mais une idée saugrenue me traverse l'esprit deux ou trois fois "et si je m'écrasais comme une crêpe,
tu as vu ce que ça faisait à 3 mètres imagine à 500 m, bon le mental n'y est pas encore, je décide de sortir, les autres voiles sont un peu plus hauts désormais mais je les abandonne. De toute façon, je ne peux aller chercher le plaf, et reculer, j'ai cours à 17h. J'ai mis une alarme pour poser, plier et repartir bosser. Je rejoue un peu en soaring, j'ai de nouveau envie de repartir prendre de l'altitude, ça revient... je trouve un thermique qui m'emmène quelque part mais pas si haut. J'ai envie de poser en arrière loin sur le plateau mais pas assez de hauteur, les autres voiles sont redescendues plus bas. Que faire ? et là, ça commence à poser sauf une voile, tant pis, je vais profiter de la navette.. je vais poser sur l'atterro officiel, je veux soigner mon approche, hop, je sors de la sellette, mais une mauvaise pensée, me traverse,est-ce que ma colonne va tenir, il n'y a pas de
mais je suis les autres et là je ne sens pas de vent porter contre, j'atterris mis-sellette, mis-jambe (repliées), quel nigaud je suis. c'était la bonne direction mais faut courir mon gars... Trop content, me suis pas fait mal. Je fais un peu de gonflage (d'ailleurs pas vu un gars dans le soleil qui atterrissait - suis allé m'excuser après) pour vider ma voile du sable, je gonfle et vais près de la route, la voile au-dessus de la tête. ça fait du bien !
Que de chemin parcouru depuis le lit d'hôpital. c'et bon d'être là ! c'est bon la vie. Allez vite la navette d'un parapentiste généreux et je file en cours.
45 minutes plus tard, je suis devant mes étudiants.
La vie est belle. c'est si bon de voler.
1h30 de bonheur entrecoupé d'hésitations et de peurs passagères et de zones d'ombre. Vivement le prochain vol que je consolide tout ça. Sensations, mental et corps. Dans quelques jours...
Bons vols plaisir safe