Alors puisque le dernier récit de vol est à Poupet, et bien j'enchaîne avec un récit de vol...
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pas du tout à Poupet !
Le vol date de 2001, le récit aussi d'ailleurs !
A l'époque, je commençais tout juste à faire mes décos face voile propre. Je volais en Agena ! Et oui, j'avais fait avec les moyens de mon porte-monnaie de chomeur (j'en profite pour remercier tout ceux qui travaillaient à ce moment là de m'avoir payer mon stage initiation et une partie de mon aile !
Enfin depuis quelques années, je le rend bien à d'autres !
)
Le récit donc :
L?été 2001 se termine? L?automne approche? Les vols se raréfient : vacances terminées, soleil moins présent, ? Tant de choses qui me disent que mes beaux vols de l?année sont derrière moi. Il faudra se montrer patient durant l?hiver qui se prépare? Et pourtant, début novembre, alors que les sommets alpins ont reçu leurs premières neiges, Nicolas, un bon pote, m?appelle au téléphone pour me proposer une ballade en montagne avec l?aile sur le dos. Un coup d??il à la météo et effectivement, tout à l?air de laisser croire que le week-end s?annonce superbe ! Peut être le dernier avant le retour du froid et de la pluie? Amoureux des Alpes et, vous le savez, du parapente, je m?empresse de lui confirmer que je suis partant. Il me propose alors le Grand Bargy. Cette rando est bien expliquée dans le bouquin de Manu BONTE (Parapente Sauvage) et elle a l?avantage d?offrir deux orientations différentes (Nord ou Sud). Un simple coup de fil à la météo le matin du vol suffit à se décider. De toute façon, les deux côtés promettent une magnifique vue.
Le week-end approche. Habitué de la rando mais jamais du vol-rando, je m?inspire beaucoup des conseils de Manu BONTE pour ficeler un sac léger mais contenant le nécessaire. Finalement, je boucle à un peu plus de 10 kilos avec une Agena et une selette ?made in Eric? ainsi que tout le nécessaire pour la rando. Ca me rappelle une année ou j?ai fait une grande partie du Tour de Haute Maurienne avec un sac à plus de 12 kilos !
Nous sommes partis? Arrivés de bonne heure à proximité (il fait encore nuit), nous nous arrêtons boire un chocolat. Attente du bulletin de 8h00, coup de fil à la météo? Vent nul ou faible, une perturbation arrive mais sans risque pour aujourd?hui, une mer de nuages est annoncée à 1200 m. Malgré les recommandations des locaux au café qui nous annonçaient du nord, nous décidons de prendre la face sud. De toute façon, en nord il aurait fallu passer l?épaisse mer de nuage pour poser alors qu?en sud, l?atterro se trouve au-dessus.
Une route sinueuse et ombragée nous mène jusqu?au départ. La neige que l?on trouve à cette altitude commence à nous faire peur. Au parking (1300 m.), bien que les faces sud ont l?air assez verte, on se rend compte que la neige est déjà bien présente par endroit? Tant pis, nous sommes là et sans encore trop vouloir croire au vol final, nous nous lançons dans la rando, peu après un petit groupe. Quelques mètres plus haut, au passage d?un gîte, nous localisons le terrain qui nous servira d?atterro. Le bouquin prévenait que ce terrain est en pente. Mais à ce point là, je ne m?y attendais pas ! Plus tard, au sommet, on se rendra compte que l?atterro est beaucoup plus pentu que le déco? Pour vous faire une idée, cet atterro ressemble un peu à la partie bien en pente du déco de Chamoux. A peine après notre départ, le soleil se lève et les premiers ennuis arrivent. Il fait chaud, très chaud ! Nous avons pris bien trop de vêtements avec nous? Trop tard pour faire demi-tour, il faudra supporter cette charge supplémentaire sur notre dos? Et finalement, il vaut mieux jouer la prudence. La montagne réserve souvent des surprises?
Nous avalons avec un bon rythme les premiers mètres passant de verdures à sapins, de sapins à rochers et de rochers à neige? La première étape consiste à passer le col de l?Encrenaz (2015 m.). La première partie est simple et magnifique. On profite de la vue et de la ballade à fond. Mais les derniers mètres nous séparant du col commencent à être plus délicat. Il faut s?aider des mains pour monter de roches en roches jusqu?en haut. Attention vertige ! Une fois au col, le jeu en valait vraiment la chandelle ! Vu magnifique sur le Mont Blanc, le Grand Bornand, les Aravis et le Beaufortain. Le côté nord nous offre un spectacle tout aussi grandiose mais nettement plus hostile au vol-rando : mer de nuage à perte de vue, manteau de neige parfois épais et courant d?air glacial ! Bien que le vent reste nul à ce moment de la rando, nous ne regrettons pas notre choix au sud !
Un peu fatigué, nous rassemblons nos forces pour continuer sur le Grand Bargy. Nous n?avions encore rien vu ! Passages étroits, caillouteux et enneigés nous réservent parfois de bien fatigantes surprises. Le jeu consiste à deviner où sont les pierres pour poser le pied dessus et non entre? Mais avec la neige qui égalise le terrain, ce n?est pas simple et nous nous retrouvons parfois avec de la neige jusqu?aux genoux ! Au fur et à mesure de notre progression, je prie pour que l?on puisse décoller car le chemin en sens inverse risque d?être très dur et très long !
11h00. Le grand Bargy est maintenant tout proche. Il ne nous reste plus qu?à marcher sur la crête avec un dénivelé nettement plus raisonnable que précédemment. Le temps est venu de faire une bonne pause. Barre de céréales et sucres rapides sont les bienvenues ! Un groupe de randonneurs passe. « Vous faites du parapente ? ». On discute 5 minutes avec eux. Ce sont des gens de la région et ils ne sont même pas surpris de nous voir ici? Et nous qui nous croyons en plein exploit ! « Vous êtes presque arrivés, bon courage ! ».
Effectivement, nous reprenons la marche pour un assez court instant. A peine une demi heure plus tard, nous arrivons, juste au pied du sommet vers un vaste espace en pente douce? Dans le livre, il était écrit une pelouse? Sous la neige, certainement ! Et cet endroit que nous avons trouvé ressemble énormément au plus beau déco dont je rêvais. En arrivant, nous posons les sacs pour respirer ce petit air à la fois doux et à la fois frais qui nous caresse le visage? Miracle que de trouver cette récompense à nos efforts : Une petite brise presque laminaire nous chuchote à l?oreille que l?on peut décoller sans crainte. Il est alors presque midi et un voile d?altitude commence à se rapprocher du soleil. Aucune hésitation, nous déplions sans perdre de temps.
Encore un problème se pose. Avez-vous déjà essayé d?étaler une aile sur une pente enneigée ? Si oui, vous devriez comprendre sans peine que c?est un sacré jeu de patience que de faire une visite prévol dans ces conditions ! Le moindre petit bougé de suspentes et la voile glisse jusqu?à nos pieds (voir même plus bas !). Un petit truc que je vous donne et auquel je penserai la prochaine fois : Des allumettes. Mais non ! Pas pour faire fondre la neige ! En fait, l?astuce consiste à piquer des allumettes dans la neige et à passer les suspentes du bord d?attaque derrière. La voile est maintenue mais ça ne gène en rien le moment ou l?on tire les avants pour décoller et ces petits morceaux de bois ne sont pas polluants.
Nico décolle. Une merveille : L?aile bien droite, sans n?ud, une course d?élan de quelques petits pas et le voilà en l?air ! Je m?arrête dans mes préparatifs pour le regarder voler un instant et faire quelques photos. C?est vraiment magnifique? Je me replonge dans ma prévol et soudain l?angoisse ! Je réalise que je suis seul, à près de 2300 m. d?altitude, très fatigué, dans la neige, avec une aile qui n?arrête pas de faire le contraire de ce que je lui demande. De plus, à quelques dizaines de mètres en dessous, une falaise immense. Ce moment assez bref, je m?en souviendrais toute ma vie. Cette angoisse n?est pas devenue ce genre de situation ?flippante? d?où on aimerait bien se sortir mais au contraire, elle se transformait en une excitation assez forte. Je saute dans ma sellette, re-vérifie tout une dernière fois en me pensant que l?erreur ne m?est pas vraiment permise. Premier prégonflage face à l?aile. Au moment ou l?aile touche le sol, je tire de nouveau les avants pour ne pas la laisser partir en glissade sur la neige. L?aile monte et au même moment, je sens comme une bonne bouffe passer. Pas le temps de réagir, l?aile a également ressenti cette bouffe? En moins de temps qu?il ne faut pour le dire, je me retrouve catapulté en l?air un peu comme certains jours à La Cote? Je décolle twisté mais continue de contrôler l?aile. Je me retourne pile au moment ou je passe la falaise. Ma première vue une fois détwisté fût un vide de près de 700 m ! Impressionnant ! Je m?installe au fond de la sellette et instant magique, j?ai même le droit à un peu de soaring le long du relief ! Mais je ne vole pas pour ça. C?est très différent d?un vol ordinaire où je me serais certainement battu pour rester en l?air. Le plaisir de voler n?est pas du tout le même. Difficilement descriptible mais tellement heureux d?être en l?air. Je longe le relief puis survole les endroits où nous sommes montés le matin. Quelques randonneurs s?arrêtent un instant pour me regarder voler. Je ne sais pas ce qu?il se pensait mais à leur place je me serais dit : « Quelle chance ! ».
Une dizaine de minutes plus tard, je m?éloigne du relief et passe dans la vallée. Le paysage change radicalement. Je vois encore au fond la mer de nuage qui n?arrive pas à se dissiper. Le sol se rapproche, je repère l?atterro et commence à penser à l?approche. Le terrain arrive vite mais je pose en douceur. Je m?effondre par terre un peu envahi par quelques crampes vraisemblablement du fait de la déshydratation lors de la visite prévol et du vol. L?effort était important dans la neige. Nico arrive vers moi, nous sommes heureux, nous crions de joie? C?était SU-PER-BE ! Et les sensations lors du vol sont vraiment différentes d?un autre vol. Ce vol prendra la première place au palmarès de mes plus beaux vols ! Voilà un moment déjà que je pratiquais le parapente. Mais ce jour là, j?ai découvert un autre sport : Le vol rando !